15 BD pour l’été
Envie de lire des bandes dessinées cet été ? Des livres qui sortent de l’ordinaire, pas trop tristes ni trop intello ? Des aventures, exotiques ou intimes, des tranches de vie, réelles ou fantasmées ? Voici la sélection de BoDoï parmi la production BD des derniers mois, privilégiant l’évasion, la détente, la comédie, le vent d’air frais, mais sans oublier l’intelligence pour autant. Bonne lecture ! (et que les petits lecteurs ne trépignent pas, on leur concocte une sélection rien que pour eux pour bientôt)
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Nordique
Dans Groenland Vertigo, Hervé Tanquerelle fictionne l’expédition scientifico-artistique dans le Grand Nord à laquelle il a participé, aux côtés de l’écrivain Jorn Riel (dont il avait adapté les Racontars arctiques). Et pour ce faire, il lorgne du côté d’Hergé et de L’Étoile mystérieuse, et multiplie les sympathiques références. Il en ressort un album loufoque et étonnant, grand public mais piquant, et très souvent désopilant. Casterman, 19 €.
Flegmatique
Avec Le Coup de Prague, Jean-Luc Fromental et Miles Hyman proposent une grande bande dessinée classique, dans un genre négligé car complexe : l’espionnage. Ils imaginent l’écrivain anglais Graham Greene se rendant à Vienne, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, pour préparer le film Le Troisième Homme. Mais dans cette ville peuplée d’agents secrets, il a d’autres plans en tête… On se perd avec délectation dans ce scénario tordu et parfaitement rythmé, comme un bon film de l’époque, magnifié par un trait à la forte personnalité. Dupuis/Aire libre, 18 €.
Épique
Deux choses sautent aux yeux devant ce petit pavé à la jaquette orange. Sa longueur, d’abord, plus de 1000 pages. Son titre ensuite : Todd le géant s’est fait voler son slip. Un titre comme un programme pour ce récit épique de fantasy minimaliste, qui commence comme une aventure humoristique avant de devenir une quête métaphysique (mais jamais trop sérieuse). Hommage à Lapinot et les carottes de Patagonie de Lewis Trondheim, cette BD fleuve improvisée par Alex Chauvel est un pur bonheur de lecture, pour tous ceux qui aiment les contes et histoires à tiroirs, les expérimentations graphiques et les blagues potaches. Jouissif. The Hoochie Coochie, 25 €.
Biographiques
Avec ses Culottées, Pénélope Bagieu rend un bel hommage à des femmes qui ont, dans l’Histoire, marqué leur époque, leur pays, leur milieu. Ses portraits de journaliste, rappeuse, gynécologue, ou actrice sont autant de petits manifestes féministes, élevant au rang d’exemples ces « femmes qui ne font que ce qu’elles veulent ». Mais qu’on se rassure, ce côté militant n’enlève pas le sens du rythme ni celui de l’humour de l’auteure, qui font que ces mini-biographies n’ennuient jamais. Gallimard, 20,50 €.
Scientifique
Et si l’homme allait s’implanter sur Mars ? C’est ce qu’imagine Florence Porcel dans Mars Horizon, premier volume de la collection Octopus dirigée par Boulet. Une BD pleine d’infos techniques et scientifiques, mais rendues largement accessibles grâce à un récit au ton léger et enthousiaste, mis en image avec fluidité par Erwann Surcouf. Delcourt, 16,50 €.
Hypnotique
Le Mazzeru est, dans le folklore corse, le messager d’une mort imminente, un être craint et respecté. Et cette malédiction tombe sur un jeune garçon qui s’ennuie dans la ferme familiale, et qui rêve qu’il traque des animaux en forêt. Et puis il y a la jolie Chilina, violentée par son père une fois de trop, qui s’enfuit dans les bois pour vivre telle une bête sauvage. Un superbe livre de Jules Stromboni, aux planches muettes réalisées en gravure, auxquelles s’ajoutent de beaux monologues et poèmes, au sein d’un très grand format. Avec sa narration hypnotique et ses accès de violence sourde, voilà un des plus beaux albums de 2017. Casterman, 29 €.
Drolatique
Gus est de retour ! Enfin presque. Car dans ce quatrième tome d’une série en sommeil depuis longtemps, le cow-boy au long nez ne fait qu’une courte apparition. Pas grave, on se réjouit de suivre les mésaventures d’un autre beau bandit, Clem, entrepreneur, père de famille et braqueur masqué. Avec son dessin tout en mouvements, son humour omniprésent et son sens de l’image qui frappe, Christophe Blain réussit son retour dans le western drolatique et romantique. Un filon d’or qui ne se tarit pas, parce qu’il est rare. Dargaud, 16,95 €.
Poétique
Dans La Malédiction de Gustav Babel, thriller fantastique et très littéraire, on suit un tueur à gages qui possède le don de parler toutes les langues du monde. Une malédiction pour ce féru de poésie qui vit sous le joug d’une organisation criminelle mondiale, qui lui a volé sa vie. Avec ce gros volume citant à l’envi Baudelaire et Borges, Gess retrouve un peu de l’ambiance de sa Brigade chimérique, mais dans un ton plus personnel, sombre et vénéneux. Singulier et ambitieux. Delcourt, 22,95 €.
Caustique
Quand sa femme le plaque, Flip se met à flipper. Il lâche son job à l’usine de sardines que, de toute façon, le patron va sauvagement fermer. Débute alors un road-movie fantasque sur les routes escarpées de l’Ardèche, en compagnie d’un musicien rigolard… Entre chronique sociale et comédie absurde, Mort & vif se déguste avec un bonheur renouvelé page après page, grâce à la verve caustique et inspirée de Jef Hautot et surtout les compositions graphiques audacieuses de David Prudhomme. Un régal. Futuropolis, 19 €.
Mythologique
Fermez les yeux et laissez-vous emporter par Les Cent nuits de Héro, ou la réinterprétation à la mode scandinave et féministe des 1001 Nuits. L’Anglaise Isabel Greenberg propose un gros livre de contes à tiroirs, brode une mythologie inspirée du folklore nord-européen, et assume un angle quasi militant pour les droits de la femme. D’apparence austère (en raison d’un graphisme sombre et anguleux), l’album se révèle plein de sentiments et d’humour pince-sans-rire. Casterman, 27 €.
Psychologique
Je voudrais être tué par une lycéenne : un titre qui résume bien l’idée tordue et l’ambiance bizarre de ce manga d’Usumaru Furuya, dans lequel un jeune prof rêve d’être assassiné par une de ses élèves. Mais attention, cette histoire n’emprunte pas les codes du thriller, proposant plutôt un récit choral qui analyse finement – et de manière très effrayante – les codes sociaux et la place de l’individu dans un groupe. Glaçant. Delcourt/Tonkam, 7,99 €.
Cinématographique
Paiement accepté confirme tout le potentiel d’Ugo Bienvenu, déjà auteur de l’excellent Sukkwan Island. Dans ce one-shot se déroulant dans un futur proche, on suit un cinéaste habité par son ambition artistique, au mépris des relations humaines, tenter de monter son grand oeuvre. Mais un accident de train va tout bouleverser. Le scénario est intelligent, le rythme impeccable, les dialogues ciselés et les idées visuelles étonnantes, dans une mise en scène évidemment très cinématographique et sous un trait réaliste bluffant. Original et excitant. Denoël 21,90 €.
Historique
Après Charly 9, Richard Guérineau poursuit son exploration de l’Histoire de France avec Henriquet, l’homme-reine. Ou le portrait du roi Henri III, dépassé par les guerres de religion post-Saint Barthélémy, la pression de sa mère Catherine, les tensions familiales, la désespérance de son épouse face à ses frasques et penchants sexuels. Un album historique passionnant et accessible, qui dépoussière le genre avec brio, humour et énergie. Delcourt, 22,95 €.
Fric et flic
Laurent Astier a rencontré Jean-Claude Pautot en prison, lors d’un atelier. De là est née une collaboration sur l’écriture d’une bande dessinée qui retrace, sous couvert de fiction, le parcours de ce braqueur, qui a passé beaucoup de temps en cavale et en prison, d’où le titre : Face au mur. Un récit plein de suspense, mais aussi d’humanité, dont la narration éclatée peut déstabiliser, sans vraiment nuire à l’ensemble, tant le trait acéré d’Astier se révèle efficace. Casterman, 19,95 €.
Cosmique
Depuis janvier se déploie une série de SF pleine d’humour et de surprises : Infinity 8. Dirigée par Lewis Trondheim et Olivier Vatine, elle offre à un scénariste et un dessinateur différents, pour chaque volume, la possibilité de produire un chapitre de cette saga de l’espace, sorte de Sillage décalé et malin. Rien de plus rafraîchissant qu’un petit tour dans le vide sidéral en bonne compagnie (Bertail, Balez, Kris, Zep, Vehlmann…). Rue de Sèvres, 4 tomes parus, 17 €.
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