À la dérive
1910, Paris est sous les eaux. La Seine a envahi la capitale, et ses habitants se débrouillent comme ils peuvent pour garder les pieds au sec. Eddie, lui, ne trouve pas de solution pour rembourser à des malfrats une monstrueuse dette de jeu. Sa compagne Agathe a bien accepté de se prostituer, mais cela ne suffira pas. Il monte alors un casse : celui des coffres d’une banque en partie inondée…
S’inspirant du parcours des bandits irlandais Eddie Guerin et Chicago May, qui braquèrent l’American Express en 1903, à deux pas de l’opéra Garnier, Xavier Coste offre un beau polar, littéraire et sensoriel. Porté par une voix off sans fioritures, et surtout installé dans le décor à couper le souffle de Paris inondée, l’auteur de Egon Schiele développe des personnages beaux, fragiles et attachants, sorte de Bonnie & Clyde à l’européenne, embarqués dans une histoire trop brutale pour eux. Au-delà d’un scénario classique et bien ficelé, et d’une narration cohérente et efficace, ce qui frappe dans ce one-shot, ce sont bien sûr ces planches éblouissantes, compositions picturales jouant magnifiquement des ombres et des saillies de couleurs. Xavier Coste anime également son récit de mises en page étonnantes, avec des formats de cases atypiques et des ajouts d’éléments graphiques, pas toujours réussis mais affirmant une démarche visuelle originale. Voilà donc un auteur de 25 ans à suivre de près, car ce troisième album tout en maîtrise (après Rimbaud, l’indésirable) montre qu’il a franchi un palier, et qu’il est prêt à laisser exploser tout son potentiel.
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