« Aaarg ! », au bord du gouffre, cherche repreneur
Mauvaise nouvelle : le magazine et les éditions Aaarg! connaissent un grave problème de trésorerie, qui les poussent à suspende la parution du mensuel et à chercher un repreneur.
Quand l’éditeur marseillais Aaarg! transformait, fin 2015-début 2016, sa luxueuse revue trimestrielle en magazine mensuel, le pari semblait insensé. Mais tellement audacieux et excitant. Hélas, le pari semble perdu pour le moment, car après seulement 4 numéros, le magazine Aaarg! va suspendre sa parution, et les éditions du même nom avec.
Pourtant, la campagne de préabonnement avait été un franc succès, avec quelque 60000 euros récoltés. Hélas, la trésorerie des éditions n’était pas bien en point : le produit de ventes met du temps à rentrer, et arrivent en même temps que les retours (livres invendus), et pendant ce temps-là les factures tombent, qui ne peuvent pas attendre. Ce qui fait que ce petit éditeur indépendant, faute d’assise financière suffisamment large, s’est vite retrouvé dans le rouge, pas aidé par un diffuseur en pleine restructuration et, semble-t-il, peu intéressé par le catalogue naissant de Aaarg!, et un imprimeur dans la panade.
« À cette heure, notre avenir est plus qu’incertain sous cette forme, explique l’équipe dans un long texte plein de détails et de chiffres, et surtout beaucoup de franchise comme d’habitude, sur son site. Le n°4 du magazine sera sûrement le dernier. Nous ne voyons pas d’issue dans la configuration actuelle, et il nous importe d’arrêter le plus proprement possible, de pouvoir indemniser les abonné.e.s qui nous ont soutenu.e.s, de payer les auteur.e.s, les imprimeur.e.s… avant de nous retrouver dans une situation ingérable. Pour une simple histoire de trésorerie, à cause de trop petites épaules pour un gros projet. »
Et de conclure : « AAARG! doit continuer et doit vivre, ça on en est persuadé.e.s. Un catalogue superbe, des projets vraiment enthousiasmants, l’arrivée d’une équipe d’auteur.e.s de plus en plus solides (et solidaires) et ce magazine pour lequel tou.te.s les lecteur.trice.s ne tarissent pas d’éloges. Nous allons d’ores et déjà rencontrer d’éventuels repreneurs et étudier des propositions crédibles et fidèles à l’esprit de la maison, dans le but de ne pas laisser mourir la bête d’un rhume alors qu’elle tire un train solide rempli de talents. AAARG! est aujourd’hui une institution dans le monde de la bande dessinée francophone, et nous en sommes fier.e.s. Nos limites et la taille de notre structure ne nous permettent plus de porter ce projet, pourtant rentable. Pour l’instant, pour une durée indéterminée, le magazine AAARG! entre dans une période de stand-by et notre avenir est incertain. »
Après les relatifs échecs de la revue numérique Professeur Cyclope (dont le label demeure toutefois, en version papier, sous bannière Casterman/Arte éditions) et l’hebdo en ligne Mauvais Esprit (certains projets ont trouvé preneur en version papier), c’est un autre projet éditorial récent, sans doute un des plus enthousiasmants, qui se retrouve dans le mur. Trop ambitieux, trop luxueux, trop marginal, diront les plus pessimistes. Mais il serait vraiment triste qu’un catalogue de plus en plus solide et intéressant, avec des perles comme Chroniques de nulle part, Borb, Bonsoir ou Des aventures pour les vrais bonhommes, et des livres toujours parfaitement édités et soignés, disparaisse aussi vite. Croisons les doigts pour que les éditions Aaarg! survivent et trouvent un financeur intelligent et ouvert, pour que se perpétue leur esprit pop et sauvage qui manquera indéniablement au paysage BD francophone si elles venaient à mourir.
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