Aldo et Rosa
Rosa a des cheveux courts, des fringues unisexes et un ami invisible. Pas imaginaire, invisible aux yeux des autres, qui la trouvent donc bizarre quand elle lui parle – en plus de la considérer comme un garçon manqué. Elle essaie donc de se faire discrète, et préfère ainsi palabrer longuement avec cet Aldo tout rond et rigolo, sorte de bibendum nuage aimant jouer avec les mots. Ce confident l’aide à combler le vide affectif de son foyer, où ses parents font le vide, justement, se séparant sans oser l’avouer. Mais le jour où Rosa découvre que les autres enfants, et même des adultes, ont aussi un ami invisible, tout change : elle peut s’ouvrir davantage aux autres et se trouver une bande de copains assumant leurs différences.
Voilà une petite perle de bonheur dessiné qui nous vient d’Italie. D’abord publiée en épisodes dans la revue Internazionale Kids, cette histoire porte un regard bienveillant et positif sur les enfants qui ne rentrent pas dans le moule, sur ceux qui sont heureux dans leur imaginaire intime plutôt que dans le partage forcé avec les camarades. Mais qui n’ont parfois besoin que d’un petit coup de pouce pour trouver un nouvel épanouissement dans la relation aux autres. Dans de courts chapitres au rythme parfaitement ciselé, la scénariste Susanna Mattiangeu flirte avec la nostalgie et la poésie quand elle met en scène ces gamins inventifs, mais ne tombe jamais dans le sirupeux ou le passéiste : elle touche juste, avec grâce et légèreté, pour parler des différences. Elle évoque aussi l’adolescence qui pointe, instant vertigineux où les amis invisibles, désormais moins utiles, pourraient disparaître pour de bon. C’est doux, touchant, et lumineux, grâce au superbe travail graphique de Mariachiara Di Giorgio, quelque part entre Manuele Fiore et Grégory Panaccione, mais avec beaucoup de personnalité. Un très beau livre, capable de toucher les enfants comme les grands.
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