Illustration, courts-métrages, expos et bandes dessinées, Anouk Ricard est une artiste aux multiples talents. Sans faire de bruit, elle installe depuis quelques années dans le paysage du 9e art son style singulier et son art du dialogue. Après la série Anna et Froga (Sarbacane), rescapée de la regrettée revue Capsule Cosmique et dans la lignée des palpitantes enquêtes du commissaire Toumi, Anouk Ricard revient avec Patti et les fourmis, où une nouvelle fois elle laisse parler son imagination délirante : l’histoire d’une petite fille qui rétrécit et qui découvre le monde coloré et étrange des insectes de son jardin…

Comment Patti et les fourmis a-t-il vu le jour ?
Au départ, il s’agit d’une demande de J’aime lire (Bayard presse), qui souhaitait une série avec une héroïne, un peu comme Anna et Froga. J’ai commencé cette série pour eux, finalement ils ont choisi un autre projet. Ensuite Thierry Laroche (directeur de la collection Bayou chez Gallimard) m’a parlé de son projet de hors série pour les plus petits, je lui ai proposé Patti car j’avais assez développé l’idée et que j’avais très envie de continuer. Et ça lui a plu.

Êtes-vous fascinée par le monde des insectes ? Pourquoi faire d’un phasme l’un des héros de l’album ?
Je ne suis pas spécialement fascinée par le monde des insectes, je crois que c’est l’idée d’humaniser les animaux qui me plaît, qu’ils soient insectes ou mammifères, comme mon personnage du Commissaire Toumi. J’aime les faire parler comme je parle. J’ai choisi le phasme, parce que c’est un insecte drôle au départ, un peu bizarre, et un peu ridicule. Mais c’est vrai aussi que petite, j’étais ultra fan de Maya l’abeille, j’imagine que ça m’a inspirée… Je jouais souvent seule dans mon jardin, je regardais de près les cailloux et j’aimais imaginer comment était le monde à travers les yeux d’un être tout petit, qu’un grain de sable soit pour lui un énorme rocher, ça m’amusait.

Patti sera donc une série. Comment va-t-elle se développer ?
Aucune idée du nombre de tomes, je sais à peu près ce qu’il va se passer dans le deuxième, mais c’est tout. L’aventure se déroulera dans la maison.

Que retrouve-t-on de vous chez vos héroïnes, Patti ou encore Anna ?
Anna est la petite fille que j’étais: réservée, discrète. Patti est celle que j’aurais rêvé d’être, téméraire, impulsive, enthousiaste, toujours positive : tout le contraire de moi!

Pensez-vous d’abord aux enfants lorsque vous travaillez ?
Pas du tout, je pense au contraire aux adultes, à mes amis et à mon mari qui est mon premier lecteur. La seule chose que je censure par rapport aux enfants, ce sont les gros mots, mais surtout pas les histoires, l’esprit et les dialogues. J’essaie d’écrire des dialogues au plus proche de la réalité, le moins enfantin et gnangnan possible.

Enfant, lisiez-vous des bandes dessinées ?
J’ai découvert très tôt la bande dessinée, il y en avait beaucoup chez moi. Je lisais tellement de BD, que ça m’a posé des problèmes à l’école, je n’arrivais pas à lire autre chose. J’ai vite dévoré tous les classiques, Astérix, Lucky Luke, Gaston Lagaffe, Tintin, Achile Talon, les Schtroumpfs, Boule et Bill, etc. Avec un faible pour Astérix et Lucky Luke, j’ai dû relire chaque album au moins vingt fois. Je suis donc sûrement marquée en premier par Goscinny, comme pas mal d’auteurs je suppose. Mais j’aimais aussi beaucoup Snoopy et Mafalda, je les dessinais. Et je lisais aussi un peu en cachette Brétécher et Reiser : ils étaient rangés à part, je n’étais pas censée les lire. Je ne comprenais pas grand chose, mais ça me plaisait quand même, c’était une ouverture vers le monde des adultes. Je les ai relus plus tard et c’était amusant de repenser aux incompréhensions des premières lectures.

Quel est votre parcours ?
J’ai fait deux ans de Beaux-arts à Aix-en-Provence et les Arts Décoratifs de Strasbourg en illustration.

BD, albums et illustrations de presse pour la jeunesse, réalisatrice pour la série Avez-vous déjà vu ?… Vous avez de nombreuses cordes à votre arc. Comment s’organise votre travail au quotidien ?
Comme tout le monde j’imagine, le fait d’avoir des projets différents ne change rien. Je travaille chez moi, j’avais un atelier mais j’avais du mal à y aller… Comme j’avais aussi une pièce de travail chez moi, c’était plus simple de rester (en pyjama). La réalisation de petit films reste une chose exceptionnelle, je n’en ai fait qu’un pour Avez-vous déjà vu?, et un pour Anna et Froga pour le stand Capsule Cosmique au festival d’Angoulême, c’est tout ! En ce moment je travaille sur une expo collective franco-belge, avec plein d’autres illustrateurs. Ces boulots me permettent de faire des choses qui me sortent du quotidien, justement.

Comment élaborez-vous et travaillez-vous votre style graphique ?
Le style graphique s’élabore au fil des ans. Je suis influencée par tout ce que je vois et qui me plaît et je fais en sorte qu’on ne voit pas trop mes influences en les mélangeant, pour avoir mon propre style.

Quels sont vos projets ?
Je travaille actuellement au quatrième tome d’Anna et Froga, prévu pour la rentrée prochaine. Et j’aimerais beaucoup trouver le temps de faire des albums adultes, un autre Commissaire Toumi et un Bayou. Mais ce sera pas pour cette année…

Propos recueillis (par email) par Romain Gallissot

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Patti et les fourmis.
Par Anouk Ricard.
Gallimard, 9,90€, le 21 janvier 2010.

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Images © Anouk Ricard / Gallimard 2010 – Sarbacane

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