Au large de l’île de Sein, le phare d’Ar-Men guide les navires perdus dans la tourmente des flots et des récifs meurtriers de la Chaussée. Perchée sur son roc, la tour de granit est devenue l’un des phares mythiques de Bretagne. Germain son gardien y est enfermé avec ses fantômes, bercé par les légendes bretonnes. Aux côtés de Louis, il veille sur l’édifice adossé à l’océan. Et puis, une nouvelle vague vient bousculer leur quotidien et faire à nouveau trembler les murs de la tour. C’est en réparant les dégâts causés par la mer, que Germain découvre gravée dans les murs du phare l’histoire de Moïzez, le premier gardien d’Ar-Men.

C’est alors l’occasion pour Emmanuel Lepage de nous embarquer dans l’épopée que fut la construction du phare d’Ar-Men qui s’alluma pour la première fois dans la nuit du 30 au 31 août 1881. « Il aura fallu quinze ans de travail, cent-quatre-vingt-quinze accostages, mille quatre cent vingt et une heures de travail… et un mort. » Cette bande dessinée est tout d’abord un travail documentaire de l’auteur qui s’est rendu sur sur place afin de comprendre les différentes étapes de la construction du phare, ainsi que les obstacles liés à une nature hostile. Cela donne au récit beaucoup de réalisme et d’humanité comme toujours dans les œuvres d’Emmanuel Lepage (Voyage aux îles de la Désolation, La Lune est blanche, Un printemps à Tchernobyl…), qui n’oublie pas non plus la mystique celte, à travers la légende de la cité d’Ys. Enfin, Ar-Men est graphiquement renversant tant le dessin renvoie à la beauté de la nature et à la violence des éléments. Grâce aux différentes palettes de couleurs, le lecteur navigue facilement dans les époques évoquées et vogue au cœur d’une histoire épique et touchante. Encore une grande oeuvre d’un auteur qui compte (Les Voyages d’Ulysse avait décroché l’an dernier le Grand Prix de la critique 2017).

Afin de prolonger le voyage dans la légende des phares bretons, le lecteur aura le plaisir de découvrir la genèse du projet dans le DVD inclus dans l’album, Le Gardien de nos côtes, réalisé par Herlé Jouon.