Explorer les relations entre bande dessinée et architecture, détailler la façon dont les auteurs interprètent et utilisent la ville dans leurs oeuvres, « sans volonté d’exhaustivité ». Voilà le parti-pris captivant de cette exposition « Archi & BD, La Ville dessinée », installée jusqu’au 2 janvier 2011 à la Cité de l’architecture et du patrimoine à Paris.

L’un de ses commissaires, Jean-Marc Thévenet, pointe la fonction de « capteur attentif du monde » de la BD. « La représentation de l’architecture en bandes dessinées est sous tendue par le sentiment, le regard, la réappropriation personnelle des lieux investis », explique-t-il sur un panneau introductif. L’expo se divise en époques et lieux différents, le long d’un parcours chronologique et linéaire habilement agencé. On profite de planches originales ou impressions d’après fichiers numériques installées sur un nouveau matériau, le Barrisol – une membrane rétroéclairée, qui offre une belle et lumineuse lisibilité.

On déambule ainsi en admirant près de 350 oeuvres de 150 auteurs, qui renvoient régulièrement à des réalisations (dessins et maquettes à l’appui) d’architectes. La visite est introduite par une impressionnante fresque de François Olislaeger, qui met en scène moult héros de BD et littérature au fil d’une « Ville dessinée ». Place ensuite à « Il était une fois Winsor McCay », hommage à New York par le créateur de Little Nemo, mais aussi George McManus, Alain Saint-Ogan, Will Eisner, Peter Kuper… La cité est encore à l’honneur avec la toile The Show must go on de Daniel Authouart (2006) ou les Manhattan transcripts (1976-1981) de l’architecte Bernard Tschumi.

Vient ensuite « L’Esprit moderne », qui agite les auteurs dans les années 1970-80. Avec la ligne claire d’Hergé, Franquin, Joost Swarte, Yves Chaland, ou Floc’h. Puis les dessins de Bilal, Moebius, Druillet, Schuiten ou Mézières, obsédés par « le passage à l’an 2000″. Un extrait de Mon oncle de Tati côtoie une peinture de François Avril ou un projet de villes-tours, imaginé par Auguste Perret. La « ville extra-muros » est aussi mise en scène avec les représentations de la banlieue ou de la province par Margerin, Baru, Crumb ou Jano (son fabuleux HLM infernal en 1982). Ce voyage au pays de la « modernité » se clôt sur une évocation de Paris, avec les visions de Tardi, Bilal, ou encore Dupuy-Berberian.

Plus exotique, la suite de la visite nous emmène au gré d’ « Itinérances de la bande dessinée ». Avec les voyages de Nicolas de Crécy (qui illustre l’affiche de l’exposition), Marc-Antoine Mathieu, Jacques Ferrandez, Loustal, ou les visions de Tokyo et du Japon de Jirô Taniguchi (voir ci-contre), Naoki Urasawa, Emmanuel Guibert ou Frédéric Boilet…

Enfin, l’exposition se termine par des « Regards croisés », rassemblant de nombreux projets et réalisations architecturales (dont une maquette du musée Hergé à Louvain-la-Neuve, par Christian de Portzamparc). On se délecte aussi de deux films de Ferraille productions, fomentés par Winshluss: Villemolle, village du futur, et une visite guidée hilarante de l’endroit en question. Une façon de clore avec humour cette mise en valeur intelligente des cités de papier.

Laurence Le Saux

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Archi & BD, La Ville dessinée
Exposition à la Cité de l’architecture et du patrimoine, jusqu’au 2 janvier 2011.
1, place du Trocadéro, 75017 Paris, 01 58 51 52 00.

Images © Cité de l’architecture et du patrimoine – Nicolas de Crécy – Daredevil/Galerie 9e art, Paris – Jirô Taniguchi.

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