Astra Nova
Ça y est, elle part. Nova est une jeune astronaute brillante, et elle vient d’être sélectionnée pour mener une expédition aux confins de la galaxie. Seule. Car c’est c’est un voyage sans retour. A priori, pas de problème pour elle, qui n’a plus ni famille ni amis. Sauf que le protocole dans ce genre de programme spatial exige que le candidat au départ organise une fête d’adieu avec ses proches. Et voilà Nova contrainte d’accueillir ses vieux copains d’adolescence qu’elle n’a pas vus depuis des années. L’une est mère de famille, malheureuse dans son couple. L’autre est un historien s’occupant de son père dépendant. Le troisième aime s’habiller en femme et cherche l’amour et l’affection. La soirée de retrouvailles sera forcément étrange…
Après l’intéressant Avant l’oubli, Lisa Blumen revient à l’Employé du moi avec un album encore plus fin et plus abouti, construisant un décor de science-fiction pour mieux parler des relations humaines, du temps qui passe et des désirs inassouvis. Derrière ses grandes lunettes effaçant toute expressivité, Nova est d’abord la spectatrice des retrouvailles des vieux potes de lycée. Puis, elle qui s’était construit une carapace blindée contre les sentiments, afin de consacrer tout son temps et tout son être à sa réussite professionnelle, se retrouve dépassée par les émotions : elle a accompli son rêve d’aller tutoyer les étoiles, mais elle a manqué tout le reste, tout ce qui fait d’elle une humaine, c’est-à-dire un animal social, fait de peines, de rires, de doutes, de joie, de larmes. Ce ressort classique de la fiction de quadras-quinquas du cinéma français est amené avec justesse et sobriété, au sein d’un récit jamais trop bavard, tantôt funèbre tantôt cocasse, porté par des personnages un poil plus jeunes, à même de toucher les trentenaires actuels. Lisa Blumen ne rejette pas certains archétypes, mais s’appuie sur eux pour exprimer de manière directe et claire les questionnements sur les choix de vie, le sens des actions et l’importance de l’expression des ressentis. Par son trait frêle, ses aquarelles vibrantes, ses compositions de pages et cadrages étudiés, elle réussit à bâtir un petit univers humaniste d’une singulière beauté. Une lumineuse surprise, sincèrement touchante.
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