Bayou Bastardise #1
Dans ce coin poisseux de la Louisiane, on se drogue, on boit trop, on fait du catch sans feinter, on fabrique de la dope dans une grange, on donne à manger aux alligators, on chante le blues, on prie Dieu (vite fait) ou on met le feu à des cabanes (habitées, bien sûr). Bienvenue dans un enfer terrestre moite et ultra violent, peuplé de sadiques et de paumés.
Pour son premier scénario de bande dessinée, Armand Brard propose une plongée cauchemardesque au coeur du bayou, comme une tragédie classique interprétée par des curés escrocs, des gamins catcheurs, une famille de redneks toxico, une fratrie de chimistes amateurs, un ex-soldat traumatisé, et un duo de musicologues parlant aux fantômes. La sauce, épicée forcément, prend rapidement. L’histoire est malicieusement emberlificotée autour de cette presque trop grande galerie de personnages, qui dialoguent dans une langue curieuse, mâtinée de cajun et de créole, donnant toute sa musicalité au récit. D’un abord peu évident, Bayou Bastardise finit par séduire totalement au fil des pages, une fois accepté le fait d’être bousculé et trimballé de scènes de crimes en endroits glauques. Le dessin de Neyef (Doggybags présente : Southcentral stories) y est pour beaucoup, lui qui a fait des progrès spectaculaires depuis Ce goût. Ses tronches déformées de petites frappes et de raclures dégénérées sont savoureuses, son trait aiguisé et détaillé épate à chaque page, tout comme son usage de couleurs et textures qui évoque The Grocery. Encore une percutante découverte du Label 619 d’Ankama.
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