BD à Bastia : l’expo Luz
Le dessinateur Luz est l’invité exceptionnel de la 31e édition de BD à Bastia, pour une exposition rétrospective de son travail en bande dessinée – et donc pas pour l’illustration ou le dessin de presse. Une excellente idée, tant l’ancien dessinateur de Charlie Hebdo démontre depuis plusieurs années son talent de narrateur graphique.
Sur les murs blancs de l’Arsenale, au sommet de la Citadelle de Bastia, une ligne épaisse et mouvante se coule. Par-dessus, des dizaines de planches originales de grand format, de plusieurs albums signés Luz. Tel est le parti pris de l’exposition « Luzoscopie » : pénétrer dans l’âme et les tripes de l’auteur, pour mettre en lumière son travail de l’encre, au service d’histoires très différentes les unes des autres.
L’exposition s’ouvre ainsi sur Hollywood menteurs, un travail autour du tournage du film The Misfits de Johan Huston, où l’on croise Marylin Monroe et Clark Gable. Puis, ce sont les planches de Testosterror, une de nos BD préférées de 2023, qui s’épanchent : une fiction contemporaine, mêlant avec énormément d’humour #MeToo, les gilets jaunes et le covid, autour d’une épidémie d’une maladie des testicules qui fait émerger des mouvements masculinistes radicaux.
S’enchaînent, presque sans prévenir, les originaux de son adaptation de Vernon Subutex de Virginie Despentes : plus denses en texte et en encre que Testosterror, ces planches portent aussi des mises en page étonnantes, des cadrages fous et une énergie unique. L’exposition est aussi, alors, l’occasion de mesurer le travail de recherche et d’adéquation avec son sujet de Luz, entre la comédie sociale Testosterror et le portrait littéraire d’une époque dans Vernon Subutex. Le trait est semblable, mais l’approche est différente. Et seule la juxtaposition des travaux permet de l’apprécier à ce point.
Même effet dans la dernière salle, qui dévoile des originaux des Indélébiles (souvenirs de Charlie), de Catharsis (avec ses irruptions de couleur rouge feu) ou le somptueux et déchirant Ô vous, frères humains d’après Albert Cohen.
Si l’accumulation d’originaux pourra être dure à encaisser au premier regard, elle permet de mettre en lumière le chemin parcouru par un dessinateur en quelques années. Un chemin brillant et original, qui a encore mille voix à explorer.
Photos © BoDoï
Publiez un commentaire