Big Questions ****
Par Anders Nilsen. L’Association, 49 €, le 15 novembre 2012.
D’abord, il y a des petits oiseaux. Qui picorent, volent, construisent un nid, se chamaillent. Qui parlent aussi, côtoient des chiens, des corneilles, des écureuils et un serpent. Et puis il y a ce pilote, qui s’écrase à bord de son avion, et en ressort en apparence indemne. Et enfin, il y a une vieille dame et son petit-fils, grand gaillard physiquement, mais coincé mentalement à l’âge d’un an ou deux. Au final, il y a dans cet énorme livre de près de 600 pages une parabole de la vie et de la naissance d’une société.
Né lors d’un travail d’improvisation alors que l’auteur n’était encore qu’étudiant, Big Questions a mis quinze ans à devenir l’ouvrage qu’il est aujourd’hui : un monument inclassable, livre-monde introspectif à la fois doux et dérangeant. Anders Nilsen démarre avec des saynètes plutôt humoristiques, ou alors oniriques et un poil (une plume?) métaphysiques. Puis il bâtit peu à peu un univers dans lequel ses oiseaux commencent à ressembler aux humains : des croyances s’installent, des leaders s’imposent, des couards obéissent, des rebelles se battent. Un nouveau monde éclot. Car tout est ici question de naissance – n’est-ce d’ailleurs pas là la plus grande des interrogations de l’Homme (d’où venons-nous? et pourquoi?) ? Le pilote sort de son oeuf et ne rêve que de mort, comme s’il était en phase de réincarnation. Le grand idiot est comme un nouveau-né qui vit une découverte à chaque minute de son existence toute neuve. Et les oiseaux, comme dans un feuilleton de science-fiction, accèdent à une autre forme de conscience.
Au fil des pages, c’est bien sûr aussi à la naissance d’un auteur qu’on assiste. Nilsen explore ses tourments les plus intimes – en tant qu’homme, en tant qu’artiste –, enrichit ses techniques narratives et graphiques (la limpidité de son trait, son sens de la composition et de l’épure ne cessent d’impressionner), creuse au plus profond de ce qu’il est, et de celui qu’il devient au cours des 15 ans de création de l’album. Mais Big Questions n’est pas le simple miroir de son être profond, car l’auteur s’attache à composer un conte universel, souvent secret, parfois hermétique, mais qui résonne longtemps dans la tête et le coeur du lecteur une fois le livre refermé. Ambitieux, troublant et magnifique (hors de prix, aussi), voilà sans aucun doute une oeuvre qui fera date.
Achetez Big Questions sur Fnac.com
Achetez Big Questions sur Amazon.fr
Achetez Big Questions sur BDFugue.com
Articles associés
Allez voir les beaux tampons de Vincent Sardon!... 13 février 2009 | Benjamin Roure
L’éblouissant « Hélios » d’Étienne Chaize... 10 mai 2016 | Benjamin Roure

Le Masque aux mille larmes #1 15 octobre 2019 | Benjamin Roure

Le Berger *** 5 septembre 2013 | Laurence Le Saux
-
novembre 28, 2012
GaryUne bd magnifique que j’avais commandé en import, à l’époque…
Publiez un commentaire
Articles Récents
Commentaires Récents
- La bande dessinée dans tous ses états… | Cercle Progressiste Carnussien { […] L’étranger, BD de Jacques Ferrandez (source © J. Ferrandez... }
- rémi sur Jérémie Moreau : "Montrer la puissance extraordinaire de la nature" { Je suis perplexe. Il nous parle de la nature, mais... } –
- Gance sur Best of 2024 : les meilleures BD de l'année { Le top de moi-même 1 Au dedans McPhail 2 La... } –
- Juju sur Peter Pan de Kensington { Un Peter Pan comme je ne le connaissais pas. Mais... } –
- Juju sur Shin Zero #1 { C'est LE manga du moment. Des auteurs à succès. Des... } –
- Yvon Bertorello | Nouvel Hay { […] Roure, « Le Prince de Sassoun [archive] », BoDoï, 11 octobre […] }
Commentaires