Sally Salinger, détective privée désormais en couple avec Osvaldo Brown, vient d’accepter une mission simple en apparence : prouver l’infidélité du richissime patron d’AFB, entreprise qui fabrique des bonbons addictifs à Trituro. Sauf qu’une étrange et jolie secrétaire va tout dérégler…

Le talentueux Anthony Pastor développe ici l’univers séduisant de Castilla Drive, primé au festival d’Angoulême 2013. Dans ce polar bien troussé tirant autant vers les sentiments à l’eau de rose que la chronique sociale, on retrouve une intrigante galerie de personnages, très dense et pourtant maîtrisée : Sally entourée d’un beau gosse doué pour le skate, un rejeton drogué aux sucreries radioactives, une femme trompée, un patron rendu fou par une assistante envoûtante à en mourir… Pour ajouter à l’étrangeté ambiante, l’auteur campe un décor fantasmé qui prophétise l’inévitable drame, révèle au compte-goutte les intentions de chacun, et entretient ainsi le mystère jusqu’à l’explosif bouquet final.

Mais, encore une fois, c’est bien la griffe Pastor qui fait mouche : le mélange des genres entre romance faussement légère et polar transi, la mise en scène cinématographique, les cadrages puissants. L’ensemble tirant sa force de superbes ambiances, chaudes et poétiques, malgré un certain ronronnement narratif dans ce one-shot long de 260 pages. Mais l’auteur compose avec originalité une intrigue plaisante, tout en s’autorisant à parler sentiments et secrets de famille, débusquant les faux-semblants d’un jeu de masques où même les fantômes sont de la partie. Pas au niveau de Las Rosas, le vrai bijou de l’auteur, Bonbons atomiques reste toutefois très emballant. Et pourquoi pas imaginer un nouveau chapitre consacré à Ray, flic rejeté par Sally, dont le potentiel tragique saute aux yeux…