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Brooklyn Quesadillas ***

21 août 2013 |

picto-critique-V3-3brooklyn_quesadillas_couvPar Anthony Huchette. Cornélius, 14,50 €, le 23 mai 2013.

Joseph vient de s’installer à Brooklyn avec sa femme et son fils. Réalisateur d’un talk-show animalier curieux mais au succès modeste, il fait de petit boulots pour joindre les deux bouts. Et voici qu’un jour la routine déraille: Joseph est enlevé et entraîné sur Governor Island par d’ex-stars de séries télé américaines désormais oubliées. Mystérieusement préservées des ravages du temps, elles souhaitent désormais que cette jeunesse éternelle serve à quelque chose et veulent revenir sous les feux de la rampe. Denise du Cosby Show, Judy de Friends, Brenda de Beverly Hills Toutes n’attendent qu’une choses : que Joseph, qui a passé toute son enfance à les regarder, réalise le film qui les fera rayonner à nouveau.

brooklyn_quesadillas_image1Auteur en 2008 du beau mais discret La Marée Haute (6 pieds sous terre), puis du magnifique fanzine Love Machine (autoédition, 2010), Anthony Huchette transforme ici l’essai avec un ouvrage où sa subtile narration fait merveille. Passé maître dans l’art du récit-croisé, il entremêle des morceaux de tournages de talk-shows, de bouts de vie intime (que l’on devine autofictionnelle), de récits d’aventures liés au kidnapping… Le tout dans une ambiance qui transpire l’amour d’une certaine télévision désuète mais pleine de charme : des séries ringardes aux superbes animations des frères Fleisher.

Si l’influence graphique de Blutch, avec qui Huchette a travaillé sur l’animation de Peur(s) du noir, est encore présente, notamment dans certains passages où Joseph est entouré de toutes ces femmes longilignes, il s’en émancipe peu à peu. On est particulièrement emporté par les moments de talk-shows en roue libre et par des répliques ciselées, portées par un graphisme animalier très évocateur. Les séquences familiales, plus proches du croquis, sont également des respirations toujours adéquates.

Loin de se limiter à son argument de base, qui n’est qu’un prétexte pour parler de l’anxiété du passage à l’âge adulte et à la « responsabilité » d’un jeune père, Brooklyn Quesadillas va dans de nombreuses directions et surprend par une inventivité qu’on ne soupçonne pas au premier abord. Peut-être pas encore le grand-œuvre de son auteur, mais on s’en approche.

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