Ce qui se passe dans la forêt
« Ce qui se passe dans la forêt reste dans la forêt. » C’est le mot d’ordre d’une petite bande de gamines de quatorze ans, excitées par la montée d’hormones adolescentes et mortes de trouille à l’idée de franchir la ligne de l’âge adulte, point de non retour. Alors, elles jouent, comme des enfants. Mais se parlent comme des grandes. De sexe sans rien en savoir, de cuites en plein air sans avoir jamais bu une goutte d’alcool. Elles asticotent les garçons, se prennent par la main, s’affirment ou fondent en larmes. L’adolescence, un moment à la fois merveilleux et dur à passer.
C’est ce qui ressort de cette première BD d’Hilda-Maria Sandgren, qu’on imagine aisément d’inspiration autobiographique. La Suédoise y décrit avec beaucoup de justesse les interminables journées à l’école ou en vacances de ces enfants qui n’en sont plus, et qui trompent l’ennui en imaginant l’avenir ou en faisant des bêtises. Avec son dessin au crayon vif et parfois assez charnel, elle saisit les regards inquiets et les mouvements heurtés de ces corps qui changent sans avoir prévenu. Elle happe les mains qui se touchent, les cheveux qui ondulent, les postures de celle fait la maligne et de celle qui préférerait qu’on ne le voie pas. Et d’un coup, elle décrit dans un gris rageur ce que certains nomment des jeux de gamins, mais qui est une véritable agression sexuelle. Qui sera tue, car ce qui se passe dans la forêt…
L’ensemble de son livre est cohérent, et sonne juste. Mais il lui manque sans doute un fil directeur, une petite intrigue qui élèverait le récit au-delà de la simple tranche de vie, entrecoupée par de jolies mais longues et répétitives pages de paysages. L’identification en serait renforcée et l’album gagnerait en puissance émotive. Mais il n’en demeure pas moins un bon livre sur l’adolescence, sobre et loin des clichés.
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