Ceci n’est pas de la BD, par Samuel Stento
Quand il ne sculpte pas ou ne rédige pas un scénario avec son compère Guillaume Trouillard – leur dernier ouvrage, La Saison des flèches, a récolté un prix en Espagne -, Samuel Stento revisite la trombine des héros emblématiques de la bande dessinée. Ce montpelliérain de 30 ans peint un « marsupilamier » (arbre à Marsupilamis), un grand-tirebouschtroumpf ou encore un Dupond sortant à l’infini du melon d’un Dupont. Chaque jour pendant deux semaines, à partir du lundi 23 février, BoDoï vous fait découvrir une œuvre de cet artiste touche-à-tout passionné de bulles.
Pourquoi réinterpréter des héros de BD ?
Cela me permet de réconcilier la peinture et la bande dessinée, d’effectuer une sorte de médiation culturelle entre ces deux arts pas toujours amis, puisque la BD souffre souvent d’un complexe d’infériorité par rapport à la peinture.
Comment avez-vous procédé ?
J’ai tout simplement décalqué les personnages, avant de les agrandir et de faire des collages surréalistes. Ensuite, je travaille à l’ancienne, comme pour une peinture à l’huile, en me plaçant sous l’ombre tutélaire de Magritte. Je rajoute des nuances pour inscrire le tableau dans la période pré-impressionniste, et je tente d’amener ces héros de BD vers les cimaises des musées.
D’où vient votre goût pour la bande dessinée ?
J’ai toujours été un gros fan de ce médium, qui me ramène à l’enfance. Mon accès à la peinture et à la littérature s’est fait à travers lui. Après des études à La Cambre en Belgique, je me suis inscrit à l’École européenne supérieure de l’image d’Angoulême – qui fut fréquentée par Nicolas de Crécy, dont j’admire énormément le travail. J’ai fait partie de la « promotion Clafoutis », du nom de la revue publiée par mon camarade Guillaume Trouillard [fondateur des éditions de La Cerise]. J’ai ensuite suivi des cours de journalisme en Italie pendant un an environ, pour apprendre à écrire. Et j’ai réussi à vivre en vendant mes dessins. J’ai notamment illustré la pochette de l’album Mutatis Mutandis de la chanteuse Juliette.
Pourquoi ne pas être devenu auteur de BD à plein temps, comme vous le souhaitiez ?
Je me suis progressivement détaché de la bande dessinée, même si j’apprécie beaucoup sa modestie esthétique, sa façon d’être intelligente sans se prendre la tête. Mon style graphique est très proche de la peinture. Or la BD demande un trait plus simple et narratif. Je ne sais pas trop ce que je suis finalement. Une espèce d’artiste qui fait ce qu’il a envie de faire et le propose ensuite aux gens qui l’intéressent… Une sorte de peintre bizarre !
Vous sculptez aussi…
Je fais de la sculpture narrative, qui n’est pas destinée aux musées et cherche à raconter quelque chose. J’ai travaillé sur des « animaux monumentaux », en partant du postulat que notre environnement architectural n’a pas été bâti par les hommes mais pondu par les bêtes. Et sur des « animaux musicaux », à savoir des instruments de musique animaliers, à l’état sauvage. Je loue ces expositions-spectacles à des médiathèques, où j’anime ensuite des ateliers de création pour les enfants. J’aime que les gens puissent manipuler mes sculptures et les prendre à bras le corps.
Propos recueillis par Laurence Le Saux
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Pourquoi pas ?
Par Samuel Stento.
Editions de la Cerise, 16 €, février 2009.
Les oeuvres de Samuel Stento sont exposées à la galerie Petits Papiers, à Bruxelles.
Images © Samuel Stento
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