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Cher pays de notre enfance

30 octobre 2015 |
SERIE
Cher pays de notre enfance
DESSINATEUR(S)
SCENARISTE(S)
EDITEUR(S)
PRIX
24 €
DATE DE SORTIE
08/10/2015
EAN
2754810854
Achat :

Dès la couverture, le ton est donné : un De Gaulle en costume de président, le regard légèrement fuyant, et dont l’image est tâchée de sang, jure avec la chanson de Charles Trenet, Douce France. Non, il ne sera pas question de charmantes insouciances dans ce qui demeure pourtant le « cher pays de l’enfance » des deux auteurs.

cher_pays_de_notre_enfance_image1Car il est question ici d’assassinats et de hold-up perpétrés dans les années 1970 – assassinats du juge Renaud et du ministre Boulin – mais surtout d’une organisation, le SAC (le Service d’action civique). Cette milice du parti gaulliste prend ses origines dans la Résistance, se transforme au gré des affres de l’Histoire – guerre d’Algérie, lutte contre les communistes, formation des milices patronales – et finit par être indissociable du grand banditisme (gang des Lyonnais) pour imploser avec la tuerie d’Auriol de 1981, avant d’être dissoute par le Parlement en août 1982.

Si on connait les années de plomb en Italie et en Allemagne – évoquées actuellement au cinéma par l’excellent documentaire de Jean-Gabriel Périot, Une jeunesse allemande –, la spécificité d’une violence française visant à contrôler ou déstabiliser les pouvoirs, politique ou juridique, tout en y étant souvent associé, n’était pas encore mise en évidence, du moins dans une vue d’ensemble ne tendant pas à la parcellisation des évènements. Voilà chose rétablie par Benoît Collombat, 45 ans, grand reporter à France Inter qui déjà, en 2007, enquêtait sur des épisodes sombres de l’histoire de la Ve République avec Un homme à abattre – Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin. La documentation solide et le travail extraordinaire de Collombat sont mis en valeur par le trait d’Étienne Davodeau qui, en documentariste BD chevronné (Les Mauvaises gens, Les Ignorants), traduit avec finesse dans les entretiens menés toute la complexité et les tensions engendrées par le climat de l’époque, tout en ménageant des pauses : position du faux naïf, récurrence des coups de fil passés pour rencontrer Charles Pasqua… en vain.

Voilà un album d’une grande qualité, autant sur le fond que sur la forme, éclairant et passionnant, à la narration tendue et non contemplative qui réussit le tour de force de synthétiser une époque tout en ouvrant des questionnements pertinents sur un monde politique dont nous sommes aujourd’hui les héritiers.

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