Churubusco
En 1847, les États-Unis, toujours en quête d’un accès à l’océan Pacifique, déclarent la guerre au Mexique. Le conflit éclate dans l’ancienne République du Texas. Mais au sein de l’armée yankee, constituée notamment de ressortissants européens qui monnayent droit et fortune en échange de leur aide, un groupe d’Irlandais, le bataillon San Patricio, a préféré déserter et rallier les opposants, conscients des violences et discriminations endurées par les Mexicains. Parmi eux, John Riley, James Speers et Rizzo. Les représailles seront sanglantes.
Chrubusco, signé de l’auteur italien Andrea Ferraris, raconte un fait historique peu connu et se focalise sur Rizzo, jeune Italien fuyant la misère, d’abord acquis à la cause étasunienne mais qui, face aux violences infligées aux Mexicains, se range ensuite du côté des opprimés. Un « pueblo » symbolise ce moment, Churubusco, sorte de mirage à peine idéalisé, dernier territoire de liberté, de justice et de révolte. Andrea Ferraris dessine les contours d’un eldorado, le suggère sans tout à fait le représenter pour laisser toute sa place au pouvoir de l’imaginaire.
Entre héroïsme et fin des illusions, l’auteur immerge pleinement par son crayon gras qui suinte et transpire. L’aridité du désert est palpable, la peur de la mort se lit sur les visages et le destin oblige au sacrifice. Le résultat, façon gravure, fixe ainsi à merveille une mémoire douloureuse. La documentation ne plombe jamais le récit car diluée au service de la fiction ou placée en fin d’ouvrage. Et si les personnages ne sont pas tout à fait creusés, c’est pour mieux montrer qu’ils sont au service d’un idéal. Finalement plein de souffle et d’âme, Churubusco mélange mythes et Histoire avec malice, donne une voix aux vaincus et rappelle la nécessité de résister. Comme un prélude au marxisme. Une jolie réussite.
Publiez un commentaire