Cité irréelle
Cinq histoires à vous retourner le cerveau. À vous faire perdre tous vos repères. Des personnages qui se travestissent pour mieux séduire. Qui disparaissent pour mieux renaître. Des femmes dominatrices au corps sublime, des couples improbables et mal fagotés, des relations teintées de bizarrerie… Entrez dans le monde sans fond et sans fin de cette faune troublée.
Pas facile de décrire ces récits multipliant jeux d’échos et jeux de miroirs, déroulant leurs cases en de longs rubans immersifs ou pastichant les aînés. Qu’importe, car rares sont ces histoires – plus ou moins courtes – à être aussi immersives. Cité irréelle, c’est donc la pépite de cette rentrée du côté de la BD indépendante américaine. Ce sont d’abord des influences ou références marquées mais jamais envahissantes : Daniel Clowes pour ces gueules de freaks et cette vague ambiance désenchantée ; Charles Burns pour les encrages, hachures et trames bien noires ; Steve Ditko ou Wally Wod pour la patte vintage. Côté ambiance, on se réfère aux mystères vaguement angoissants de Twin Peaks et Mulholand Drive. Personnages sidérés par le vide, aux regards vagues et jamais bien sûrs de voir la réalité ; décors citadins poisseux avec cette impression d’être traqué ; beautés vénéneuses qui foutent les jetons…
Au-delà des références, le prodige américain D.J. Bryant ouvre des failles, casse notre univers linéaire, crée une atmosphère fascinante et flippante, vertigineuse par sa créativité sans limite mais toujours lisible. Compositions circulaires, découpages « cassés » d’une minutie folle viennent au plus près traduire le tourment de personnages paumés. Comme au bord de l’abîme, on est prêt à dégringoler mais le réel finit toujours pas vous rattraper pour vous faire douter de tout. La BD aussi comme l’espace du fantasme. On y parle amour, sexe et sentiments pour un mélange hypnotique. Osez vous perdre dans ces gouffres, l’expérience est à ce prix.
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Alors question (je rigole, mais en vrai c’est un vrai critère de choix de lecture, en tout cas pour moi, et sans doute pour d’autres femmes, surtout quand ça touche aux histoires de mœurs/de sexe) : est-ce misogyne ? Autrement dit : est-ce lisible pour une femme un minimum attachée à son statut d’être humain ?
Les femmes y sont-elles réifiées ? Réduites à leur corps ?
Si elles le sont, parce que pourquoi pas après tout, les personnages masculins le sont-ils aussi ?
Est-ce qu’il y a un souci de développer les personnages féminins, dans la même mesure que les personnages masculins ? Les personnages masculins sont-ils sexualisés comme le sont visiblement les personnages féminins (au vu de l’illustration donnée en exemple ici) ?
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