Croquemitaines
Qui n’a jamais eu peur du noir ? Qui, avant d’éteindre la lumière, n’a jamais vérifié, tremblant, que le placard n’abritait que des jouets ou des vêtements ? Qui ne s’est jamais recroquevillé sous les couvertures au moindre petit bruit qui, bien sûr c’est évident, ne pouvait pas venir de sous le lit ? Pas Elliott en tout cas. Lui, il sait qu’un chien cauchemardesque hante les murs de sa maison et que ses jouets disparaissent. Lui, il sait que les monstres existent bel et bien. Mais quand un autre genre de monstre s’invite chez lui et massacre ses parents, Elliott n’a qu’une seule personne vers qui se tourner : le croquemitaine qui vit à la cave.
Mathieu Salvia revisite nos peurs d’enfant et réinvente une mythologie monstrueuse qui ne déplairait pas à un Neil Gaiman (American Gods, Sandman). Tout au long de la course poursuite haletante et brutale qui fait le cœur de l’album, il dévoile un univers riche et des personnages complexes au passé sombre. Dans un récit qui mélange avec brio plusieurs genres, l’anti-héros en quête de rédemption devra guider un enfant confronté à la perte de son innocence, et le protéger des monstres assoiffés de pouvoir et de noirceur humaine.
L’album est magnifiquement mis en scène par Djet. Ses séquences d’action, même si elles peuvent être parfois difficiles à suivre, explosent les cadres et culminent en pleines pages à la composition léchée. La tension de la traque qui se joue est toujours palpable, servie par une palette de couleurs alternant entre ambiance glauque et pluvieuse, et accès de rage sanglants. Nourri d’influences graphiques de tous horizons, Djet donne vie à sa galerie unique de personnages, monstres et humains, dans un style nerveux. Enfin, cerise sur le gâteau, un cahier graphique permet, à la fin de cette intégrale, de prolonger le plaisir des yeux.
Malgré un final cryptique qui peut laisser perplexe, Croquemitaines est le genre de cauchemar qu’on aimerait lire plus souvent.
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