Descender #2
La sensation est assez rare : dans une industrie des comics plutôt aux mains des scénaristes, on pourrait presque parcourir chaque tome de Descender sans se donner la peine de lire les textes. En acceptant de se laisser balader de planète en planète, de planche en planche, par le seul pinceau de Dustin Nguyen. Presque, car ce serait passer à côté du soin maniaque apporté par le scénariste Jeff Lemire à l’édification d’un univers de SF ultra-cohérent avec ses organisations commerciales, ses factions militaires et sa géopolitique complexe. Ce serait aussi minimiser dans cette affaire son formidable talent de conteur, auquel doit évidemment énormément l’épopée du jeune robot TIM-21, possible clé pour sauver la galaxie d’une invasion de méga-robots destructeurs. Lemire est un dialoguiste hors pair et il ne lui faut pas plus de quelques répliques pour faire exister chaque nouveau personnage introduit, que ce soit ici un chasseur de primes grande gueule (au propre comme au figuré) et ou une révolutionnaire cyborg remontée comme un coucou.
Mais il est vrai que ce que l’on retient immanquablement dans Descender, c’est l‘étourdissante virtuosité au dessin et à la couleur de Dustin Nguyen. Chaque chapitre donne l’impression d’avoir réclamé des mois de travail. On en oublierait totalement, comme l’artiste nous l’expliquait l’an dernier à Angoulême, que chez l’éditeur Image Comics, le rythme de parution et, par conséquent, les délais de livraison, sont les mêmes que chez DC et Marvel, à savoir mensuels. Une cadence infernale ! Il faut voir pourtant avec quelle maestria il donne vie, et en une case à chaque fois, à des cadeaux empoisonnés de scénariste : une planète où villes et habitants sont faits de gaz ou encore, la lune mécanique qui donne son titre à ce deuxième volume. Le grain épais du papier sur lequel il couche son travail à l’aquarelle, conservé à l’impression et de fait omniprésent, donne un caractère organique bienvenu à cette histoire de robots qui, réalisé à la palette graphique, aurait pu manquer un peu de chair. Quand fond et forme se complètent d’une telle manière, il n’y a qu’une chose à faire: se laisser embarquer, la tête en arrière et les yeux au ciel. Vers l’infini et au-delà.
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