Django Main de feu #1
Pour le musicien Thomas Dutronc, qui signe la préface de cet album, il était un « dieu de la guitare », « un phénix musical, un anti-perroquet ». Extraordinaire instrumentiste, Django Rheinhardt a marqué des générations de guitaristes, et bluffe toujours qui s’approche de son oeuvre. Les Espagnols Rubio (au scénario) et Efa (au dessin) s’emparent de son histoire romanesque, et se centrent ici particulièrement sur son enfance et ses débuts.
Classiquement, le récit début par la naissance du maître du jazz manouche, près de Charleroi en Belgique en 1910, dans des conditions plutôt précaires. Sa mère, célibataire, est toutefois bien entourée par sa communauté. Douze ans plus tard, près de Paris, le bouillonnant petit Django joue aux gangsters, se bagarre avec les gamins voisins, fait la course avec son petit frère. Surtout, le gosse qui n’a pas froid aux yeux rêve de musique. Sa mère se saigne aux quatre veines pour lui obtenir un banjo, et voit ses efforts récompensés : l’enfant travaille dur, maîtrise son instrument de façon prodigieuse, et intègre un orchestre.
La force de ce joli album, gracieusement mis en images dans des tons tantôt âpres, tantôt doux, est son sens du détail. Sans nous noyer sous les anecdotes, il prend le temps d’installer son personnage principal, de donner à voir son caractère, ses incartades, ses coups de coeur. Son attachement à la jeune Naguine, qu’il délaissera pour la bien-nommée Bella — puis retrouvera plus tard. Marié et futur père, le jeune homme subira un accident obscur : sa caravane flambe, il y laissera notamment une partie de sa main gauche, affectée jusqu’à l’os.
Faisant montre d’une remarquable persévérance, proche de l’acharnement, Django se rééduque et récupère l’usage de ses quelques doigts restants. Du banjo, il passe à la guitare, « plus « molle » et plus aiguë ». Forgeant sa destinée de maître du swing. Sans passer sur les aspérités de l’artiste (son caractère difficile, son goût pour les virées nocturnes), Django Main de feu dresse très agréablement un portrait évocateur, étayé de recherches biographiques dont les inconnues ou imprécisions ont été habilement comblées par la fiction.
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