Écoute, jolie Márcia
Márcia est infirmière à Rio de Janeiro et se démène pour que son petit monde tourne rond et avec le sourire. Son compagnon, Aluísio, est mollasson, tout l’inverse de la truculente et gouailleuse Márcia. Problème pour ce drôl de couple, la fille de Márcia, jeune adulte rondelette et vulgaire, fait les 400 coups et fricote d’un peu trop près avec la pègre locale. Jusqu’à aller au clash avec sa mère et s’en prendre physiquement à Aluísio…
Révélé en France avec le polar Tungstène, Marcello Quintanilha est le fer de lance du roman graphique brésilien. Comme dans le tendu Talc de verre, mais dans un tout autre registre, il brosse ici un formidable portrait de femme, débordant d’énergie et d’émotion, comme rarement lu en bande dessinée. Ça hurle, ça se cogne, ça se déchire, ça rit aussi, comme dans un soap opera terrifiant dans un décor de favela. Où la misère et l’ultraviolence suintent des murs des immeubles délabrés, sous le regard condescendant ou rageur des caïds et des policiers corrompus. Au-delà de cette plongée, malheureusement bien connue, dans les quartiers déshérités de Rio, c’est bien dans sa description des relations sociales et familiales que l’auteur brille. Et surtout dans cette opposition entre la fière et forte Márcia et sa fille en perdition, démon féminin abject qui ne recule devant aucune outrance. Et comme pour trancher avec le fond de ce drame familial qu’on imagine assez crédible, Marcello Quintanilha déploie une palette de couleurs tranchées, aplats criards étonnants sous un trait fin et hyper expressif : un design audacieux qui verse davantage dans la farce cartoon caustique que dans le dépliant de Copacabana. Et ce, au service de ce qui est peut-être l’un de ses meilleurs livres à ce jour. Bravo.
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