Par Gabriel Ippóliti et Diego Agrimbau. Casterman, 13,50 €, octobre 2012.

Le scénariste Diego Agrimbau est un malin : il fait se percuter deux mineurs faits historiques pour composer une belle fiction autour d’une icône du XXe siècle. Premier fait : en 1941, l’Eden Hôtel, construit et tenu par des Allemands en Argentine, est un repaire notoire de nazis. Second fait : la famille Guevara, dont le père est engagé dans un réseau antifasciste et le fils aîné asthmatique, est passé par l’Eden Hôtel, ou en tout cas non loin. Tout est là pour composer un beau récit d’espionnage, romantique et haletant, mettant en scène un adolescent construisant sa conscience politique et sociale : Ernesto Guevara, le futur Che.

Auteurs de La Grande Toile et La Bulle de Bertold, Ippóliti et Agrimbau démontrent à nouveau qu’ils savent raconter les histoires, les belles histoires, celles dont le souffle romanesque se fait sentir de la première à la dernière page. Délaissant les univers de SF, ils tordent un poil la vérité historique pour mieux décrire des faits réels mais méconnus, comme cette présence massive de nazis sur le sol argentin alors que la guerre fait rage en Europe. Et le choix d’accrocher sur cette toile de fond un épisode de la jeunesse de Che Guevara est excellent, car il est un héros né. Soutenu par des couleurs et des textures léchées, le dessin semi-réaliste d’Ippóliti réussit en quelques traits bien placés à faire vivre des expressions et susciter des émotions justes. Il est ainsi le parfait véhicule pour le scénario intelligent et sobre d’Agrimbau, qui ne se perd jamais en récitatifs inutiles, préférant une voix off précise aux accents sentimentaux. Voilà un premier tome convaincant, qui hisse la bande dessinée historique tous publics à un très haut niveau.

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