Eerie & Creepy présentent Richard Corben #1
Le label Delirium poursuit son sans faute éditorial avec le premier volume (sur deux) de l’anthologie consacrée aux meilleures histoires courtes de Richard Corben, parues dans Eerie et Creepie, revues cultes d’horreur et d’épouvante nées dans les années 1960. Corben y raconta ou illustra une quarantaine de récits de 1970 à 1978 et influença sans bruit toute une génération d’auteurs, tout en frappant la conscience de ses lecteurs.
Les dessins de Corben, ce sont d’abord des couleurs improbables, mystérieux mélange de force brute et de complexité étudiée pour un résultat graphique fascinant. À l’image de cette sublime couverture fantasmatique, image sur le fil d’un univers sauvage et bariolé. Mais aussi du noir et blanc angoissant, à la plume et à l’encre, pointant une vanité fatale (« Friedhelm le magnifique »), ou un horizon crépusculaire. Du coup, Corben trouvait dans le fantastique le terrain idéal pour exprimer sa maîtrise des découpages et son intelligence des compositions. En ressortait l’union parfaite entre des genres et un auteur dont l’esthétique irréelle devint d’ailleurs le symbole des éditions Warren.
Horreur à visée sociale, satire nonsensique, parodie d’épouvante, humour noir inspiré d’absurdité kafkaïenne, Corben s’approprie les récits avec une qualité égale, en expérimente toutes les possibilités, la technique graphique soulignant la violence ironique d’une situation ou la dimension caricaturale de ses figurants, loups-garous, morts-vivants ou dinosaures. Au-delà de l’intérêt des récits, l’album donne à voir l’évolution artistique d’un auteur sous-estimé, ses partis pris et ses audaces. En prime, les notes historiques et techniques toujours intéressantes de José Villarubia, à l’origine de la restauration des planches.
Ce classique remis au (bon) goût du jour ravira donc l’amateur de récits de genre ou tout simplement le curieux d’histoire de la BD. Ce moment fondateur de l’œuvre de Corben, aux ambiances puissantes et frappantes, méritait bien cet écrin.
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