Élise est une écolière sage, vive d’esprit et empathique, dans une petite école rurale de la France de la fin des années 1940. Mais elle vit des cauchemars quotidiens dès qu’elle arrive dans la salle de classe: sa maîtresse humilie et violente ses élèves, tout en passant pour une femme juste et séduisante auprès des parents et de l’administration. Car à l’époque, comme dit le père d’Élise, « la meilleure éducation, ce sont de bonnes paroles et de dures punitions ».

Pour sa première bande dessinée, Fabian Menor s’inspire directement de l’enfance de sa grand-mère, traumatisée par la méchanceté de son institutrice de l’époque. Et la simplicité de son traitement des souvenirs de son aïeule renforce la dureté des propos. On a entendu parler des coups de règles sur les doigts et des tirages d’oreille. Mais le châtiment systématique pour un mot de travers, un bavardage ou une erreur dans sa récitation, sous la forme de longues minutes passées au coin en portant au-dessus de sa tête, à bout de bras, des encyclopédies, voilà qui était moins documenté. Surtout quand ces punitions se muaient en humiliation : Élise souillant ses vêtements devant tout le monde car l’institutrice refusait qu’elle quitte le coin pour aller aux toilettes ; le père d’Élise la traitant de menteuse en classe quand elle ose expliquer que sa balafre au front était le fait d’une gifle avec une bague mal placée… Avec son trait sobre à l’encre de Chine, soutenu par un lavis doux même si pas encore totalement maîtrisé, Fabian Menor privilégie l’efficacité et l’émotion dans un récit linéaire et attachant. Un auteur à suivre.