Il fait chaud dans la campagne anglaise, et Emma G. Wildford attend le retour de son fiancé, Roald Hodges. Voilà plus d’un an que cet éminent membre de la Royal Geographic Society de Grande-Bretagne a quitté la mère patrie pour la Laponie, sur les traces du légendaire mais jusque-là introuvable tombeau de la déesse du feu du peuple Sami. Ainsi que celles de son héritage familial,  une lignée d’explorateurs plutôt malchanceux.

 

Une année entière, et impossible pour la jeune Emma de se résoudre à ouvrir la lettre que son amour lui a laissé en partant, « au cas où il lui arriverait malheur ». Car la jeune femme, poétesse de son état, pleine d’humour et de fraîcheur, est aussi dotée d’un optimisme à toute épreuve. D’ailleurs, c’est décidé : elle partira elle-même sur les traces de ce tombeau s’il le faut, mais elle retrouvera son fiancé, et il l’épousera, comme il le lui a promis.

Belle histoire d’une femme libre qui ose s’affranchir des convenances dans un monde d’hommes habitués à avoir tout ce qu’ils veulent, le récit se coule dans une narration qui prend agréablement son temps – et semble, par contraste, se précipiter peut-être un peu trop sur la fin. Le dessin d’Edith est sublimé par une mise en couleurs à la fois virtuose et délicate, qui souffle le chaud et le froid dans une succession d’ambiances harmonieuses. Le tout dans un très bel écrin : l’album, à la couverture ultra soignée, renferme pour le lecteur quelques surprises entre ses pages, et notamment la fameuse lettre, qui ne doit surtout pas être ouverte avant l’heure…

Un stratagème grâce auquel le lecteur aura la sensation de vivre au rythme effréné de la joyeuse et insouciante Emma, avec qui l’expression « ne pas avoir froid aux yeux » prend tout son sens. Mais gare à l’aveuglement! Car dans l’Angleterre de Virginia Woolf, cette épopée prend rapidement pour Emma G. Wildford la forme d’un voyage initiatique à la conquête d’elle-même.