Est-Ouest
Par quel autre moyen que la bande dessinée Pierre Christin aurait-il pu se lancer dans une autobiographie ? Le papa de Valérian et Laureline évoque sa jeunesse durant la deuxième moitié du XXe siècle, époque tiraillée entre deux blocs séparés par le rideau de fer. Pierre Christin a eu la chance de voyager des deux côtés de ce monde bipolaire, chose rare en période de Guerre froide.
Dans une première partie, il embarque le lecteur aux États-Unis, du côté de la pudibonde Salt Lake City et de la psychédélique San Francisco. Instants cocasses et galères automobiles se succèdent aux côtés de son compère Jean-Claude Mézières, parti à ses côtés à la découverte de la « société du bien-être ». S’ensuit un flash-back dans la France d’après-guerre où a grandi Pierre Christin. C’est le moment d’évoquer une enfance marquée par la reconstruction d’un pays blessé par la guerre et très vite empêtré dans la guerre d’Algérie. Viennent alors Sciences Po, la découverte du jazz, du dessin, la rencontre avec Jean Giraud… Et puis, direction les démocraties populaires d’Europe de l’Est, en voiture toujours. Budapest, Prague, la Roumanie, Tchernobyl, Moscou, Berlin Est… L’avenir ne semble pas si radieux à l’Est.
Pierre Christin résume ainsi ses différents voyages : « L’Amérique, où j’ai souvent posé mes valises, me séduisait et me rebutait à la fois. Les pays de l’Est, que j’ai beaucoup sillonnés, m’attiraient et m’attristaient. » Entre flower power et catastrophe nucléaire, l’auteur dévoile une histoire subjective du XXe siècle, tracée en parallèle de son parcours artistique. Le dessin de Philippe Aymond jongle avec les styles et accompagne parfaitement les diverses ambiances, de la lumineuse Californie à la grise mittel Europa. Une autobiographie réussie en forme de road movie par l’un des maîtres de la BD.
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