Et tu connaîtras l’univers et les dieux
Les éditions Tanibis produisent peu, mais nous ont habitués ces dernières années à publier des livres étonnants et importants. Comme le fascinant Le Bus, le barré Tremblez enfance Z46 ou le troublant Diagnostics. Voici ce printemps un livre du même calibre, signé du jeune Canadien Jesse Jacobs, qui n’est ni plus ni moins une réinterprétation de la création du monde et de la naissance de l’être humain !
Il imagine ainsi des sortes de divinités astrales qui, sous les conseils d’un maître, s’amusent à jouer avec la matière de l’univers, pour créer des formes et des combinaisons belles ou simplement amusantes. Quand l’un d’entre eux a l’idée de manipuler de bien peu nobles atomes de carbone, tous sont sceptiques. Mais il s’obstine et crée des animaux fort mignons, d’abord des dinosaures rigolos, ensuite des mammifères poilus. Devant ce succès inattendu, un dieu jaloux dévoie son projet et introduit violence, envie, cupidité et soif de pouvoir dans de petites créatures bipèdes, les humains…
Formes visqueuses ou géométriques, couleurs mauves ou turquoises, pleines pages de silhouettes étranges et composites face à des planches fourmillant de détails ondulants et de hachures… Le parti pris graphique est aussi étonnant que le scénario, et surtout, l’un influe sur l’autre et inversement. On est d’abord dérouté par l’audace de Jesse Jacobs et son découpage saccadé. Mais rapidement, les pièces s’imbriquent et voilà un puzzle hypnotisant, métaphysique et drôle qui se dessine. Voir des dieux au design asexué presque enfantin (loin des représentations occidentales de vénérables barbus) se chamailler et engendrer une espèce humaine belliqueuse est rapidement jouissive et offre une belle et profonde fantaisie en bande dessinée. Original et surprenant, Et tu connaîtras l’univers et les dieux est un album-expérience qui mérite d’être essayé.
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