Qu’est-ce qui représente l’expérience ultime pour des scientifiques et des religieux? À quelle question aimeraient-il répondre, de même que l’ensemble de l’humanité? La mort, évidemment. Ou plutôt ce qu’il y a après. C’est sur ces fondements que naît le projet Râ, mis en oeuvre par une multinationale richissime, et encadré par des scientifiques pointus, un jésuite envoyé par le Vatican, un pilote de la Nasa et un espion américain. Mais leur voyage aux confins de l’au-delà aura-t-il un retour?

Imaginée par le couple Denis Bajram (UW1, Trois Christs) et Valérie Mangin (Abymes, Alix Senator, Le Livre de Skrell...), cette épopée de science-fiction est extrêmement ambitieuse car elle s’aventure sur le terrain glissant des fantasmes, légendes et croyances autour du passage de vie à trépas. C’est d’ailleurs cette prise de risque qui fait tout son intérêt, et qui fera trépigner d’impatience le lecteur de découvrir la suite une fois ce premier tome refermé, alors que les voyageurs de l’impossible sont aspirés dans un vide luminescent mystérieux… Notons aussi que Bajram et Mangin n’éludent pas les questionnements politiques, philosophiques, économiques, scientifiques ou sociétaux qu’implique leur dispositif. Sans toutefois y répondre pour l’instant. On trépigne, vous dis-je.

L’autre gros atout de l’album est son découpage impeccable, rythmé et efficace, distillant les informations – sur le contenu de l’expérience, sur le passé des personnages – au compte-gouttes mais sans frustrer. Le dessin d’après photo de Jean-Michel Ponzio (Le Protocole Pélican, Genetiks, Le Complexe du chimpanzé…) offre à l’ensemble un réalisme utile pour croire à l’impossible, et évite – de justesse – de tomber dans le décorum kitsch (aaahhhh, la fameuse lumière au bout du tunnel..!). Pour peu qu’on se laisse aller à y croire, Expérience mort donnera à coup sûr quelques frissons.