Féroces tropiques **
Par Joe G. Pinelli et Thierry Bellefroid. Dupuis, 15,50€, le 4 février 2011.
La peinture coule dans ses veines. En 1913, l’Allemand Heinz von Furlau embarque pour une mission océanographique. A bord, il est considéré comme un « gribouilleur égaré ». « Toi, le peintre, t’écoutes trop dans ta tête, tu vois avec les yeux du coeur, lui lance un marin, un vrai. Ici, c’est quand il s’arrête de battre qu’on sait qu’on en avait un. »
En Papouasie, l’artiste se pose en défenseur des indigènes, quitte à devenir un paria. Tel Gauguin à Tahiti, il vit avec une autochtone, et peint à s’en étourdir. Mais la guerre va le rattraper, et Heinz va connaître la boucherie de la Somme en 1916…
Un naïf idéaliste, qui a « mal à [s]on Allemagne ». C’est ainsi qu’apparaît d’abord ce partisan du fauvisme et de l’expressionnisme, que l’existence va durement éclairer.
Le scénariste Thierry Bellefroid raconte ici le parcours d’un peintre allemand malheureusement méconnu, Heinz von Furlau. Dommage qu’il pratique des allers-retours chaotiques dans le temps, qui desservent la narration. Et que ses dialogues se montrent un brin sentencieux (« Ma trouille, c’est ma conscience », lance le héros lorsqu’il est braqué par plusieurs fusils – ou bien « Il y a des moments dans la vie où l’on sait qu’on n’est pas dans le camp des plus forts. On sait avec conviction qu’on est dans le camp des justes. »).
On se laissera toutefois porter par la puissance du travail de Joe G. Pinelli. En total accord avec les vues stylistiques de son sujet, l’auteur joue sur les matières et les couleurs. Il remplit chaque case de véritables tableaux, modifiant les ambiances selon les périodes évoquées. Et donne à ces Féroces tropiques une beauté et une âpreté bienvenues.
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