Fin
On avait quitté Anders Nilsen sur l’excellent Big Questions, fable métaphysique d’une humanité qui accède à la conscience d’elle-même. Dans le sobre et autobiographique Fin, récit sur la perte et l’acceptation, Nilsen tente de renouer avec lui-même. Et pour cause, sa fiancée vient de mourir à seulement 37 ans après 6 ans de vie commune. Pour exorciser le malheur, il raconte son état mental l’année qui a suivi son décès, tentant de répondre à des questions simples : pourquoi continuer à vivre ? comment ne pas oublier ? Nilsen dessine des monologues intérieurs, évoque les ultimes moments de vie à deux, décrit les tourments, s’interroge ou dialogue avec lui-même. Rongé par la douleur, il se désagrège et tente littéralement de se recomposer par l’acte narratif.
Pour exprimer sa douleur, Nilsen offre une mise en scène inventive entre réalisme et abstraction, et multiplie les entrées graphiques comme autant de façons de neutraliser l’absence de l’être aimé : réseaux labyrinthiques, corps esquissés aux allures de fantômes, chair qui se consume, bulles nées des cendres… Au-delà de l’expérience personnelle, Nilsen questionne la vie, la mort et la place de l’être humain au cœur de cet univers, à l’image de ces corps flottant dans l’espace sur fond de photographies balayant des paysages infinis.
Le dialogue d’abord très personnel veut toucher à l’universel dans son final, mais la démarche, plus cérébrale que sensible et parfois austère, freine une pleine immersion. Certains choix graphiques (montages dessins/photos à l’effet kitsch) ou séquences hermétiques, laissent perplexes même si l’on en comprend le cheminement. Mais une certitude, Nilsen expérimente avec ambition, nous invite à partager le deuil pour en ressortir plus vivant et apaisé. Pas vraiment bouleversant mais original et intrigant jusqu’au bout.
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