Fire Punch #1
La terre est gelée. La faim et la peur forment le quotidien des survivants, dont certains sont dotés de pouvoirs surnaturels. Agni et Luna, frère et soeur, appartiennent à ces élus et possèdent la faculté de se régénérer. Chaque jour, Agni se tranche plusieurs fois le bras – qui repousse instantanément, non sans douleur – afin que sa chair nourrisse le village qui les accueille. Jusqu’ici, tout va « bien ». Mais lorsqu’une milice armée investit les lieux, le jeune homme assiste à un insoutenable massacre. Sa sœur, ses proches, son toit : tout brûle sous la main d’un dénommé Doma, dont les flammes consument leur cible jusqu’à ce que mort s’ensuive. Transformé en torche humaine et coincé, tel Prométhée, dans un perpétuel cycle de régénération, Agni ne peut même pas prétendre à la mort… Il se tord de douleur, vomit, hurle et implore dieu, à deux doigts de perdre la raison. Son supplice s’étale sur de nombreuses années, jusqu’à ce que son cerveau parvienne enfin à assimiler la souffrance et qu’il soit capable de se déplacer. L’homme brasier part alors en quête de vengeance…
Cannibalisme ! Inceste ! Esclavage ! Zoophilie ! Fire Punch aligne les scènes choc, quitte à paraitre gratuit. C’est un monde sale et désespéré qui nous est jeté à la figure, comme le miroir grossissant des dérèglements climatiques auquel vient se greffer, de manière sous-jacente, une imagerie traumatique toute japonaise. Car Fire Punch n’est pas qu’un énième récit post-apocalyptique, malgré un dessin tourmenté, des thématiques crépusculaires et un héros maudit qui rappellent L’Attaque des titans, Hokuto no Ken ou encore Berserk. Devant cet Agni (« feu » en sanskrit) écorché, déformé et embrasé ad æternam, on pense immanquablement à un symbole qui demeure très fort : les victimes des bombardements de la Seconde Guerre mondiale… Il est une personnification errante des pires crimes que l’humanité commet contre elle-même, se dirigeant vers une issue forcément violente. Agni pourra-t-il seulement trouver l’apaisement?
On n’en a aucune idée, car tout peut arriver dans Fire Punch. Fujimoto a ouvert toutes les vannes et son flot de surprises a de quoi tenir en haleine les lecteurs les plus blasés. Seuls pêchent un découpage haché et un rythme en dents de scie – des erreurs de jeunesse qu’on espère voir rectifiées dans les volumes à venir.
© 2016 by Tatsuki Fujimoto / Shueisha Inc., Tokyo
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