Francolin
La guerre est finie. Au moins pour Francolin, qui fuit le front, bien déterminé à rejoindre sa terre. Un déserteur ? Peut-être. Un survivant lassé de l’odeur du sang et de la mort, sans aucun doute. En suivant la frontière, matérialisée par une ligne de pavé comme des pointillés de béton, il pense retrouver son chemin. Mais est-ce là son destin ?
Après La Traversée, voilà un autre conte absurde sur la guerre et ses ravages. À travers un duo improbable – un ancien soldat paumé et une taupe trop bavarde –, Adrien Houillère (qui a publié plusieurs ouvrages chez The Hoochie Coochie ou Polystyrène) philosophe sur le devenir d’un monde qui n’a plus ni queue ni tête, une société en déclin qui a oublié ses origines et ne sait pas quel est son destin. Incarnée ici par un homme arpentant sans fin une zone frontière, pas encore mort mais plus tout à fait vivant. Avec un noir et blanc contrasté et leste, Adrien Houillère offre des séquences dynamiques et inventives, ne se contentant jamais d’illustrer platement la discussion des deux antihéros. Il crée du mouvement, de l’enthousiasme ou de la dépression, déforme les traits et paysages jusqu’à l’abstraction, donnant corps de belle manière à l’orage qui gronde dans la tête de Francolin. On arpente ainsi cet album de 280 pages avec beaucoup d’interrogations mais surtout beaucoup d’émotions, inquiet du tour funèbre pris par le récit, soulagé quand revient la lumière. Une bel exercice de style.
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