Gros ours et petit lapin
Gros ours et petit lapin s’interrogent sur la marche du monde et musardent à travers champs et forêts, sous la pluie ou le soleil. Être prince, roi ou général, aimer l’oisiveté et enquêter sur le sens de l’amitié, tout prétexte à la formulation de problèmes neutralise à peine, finalement, la seule question qui vaille : sommes-nous condamnés à cette peur universelle qu’est la solitude ?
Nylso invite le lecteur à des dialogues amusés mais sérieux entre deux petites bêtes que tout semble opposer. Ils s’inventent des mondes, flânent, se rêvent en génie et devisent sur tous les sujets possibles, même les plus improbables, de l’ennui inexorable au temps qui passe, des pensées obsédantes aux problématiques de physique (l’ascension, l’inertie, la pente, la vitesse). Au cœur d’une nature préservée sur un ton badin, les deux compères creusent le mystère de l’existence pour mieux laisser respirer ce qui les dépasse. Balayés par le vent ou à peine obscurcis par une douce pénombre, éléments et paysages revivent ainsi de tout leur être à l’unisson de conversations malicieuses de deux amis pas si bêtes. Mais paradoxalement, quand le texte devient bavard et un peu long, ce sont les scènes de douce contemplation et de rêverie poétique, pauses silencieuses apaisantes, qui confèrent à l’album sa pleine mesure et de la saveur à la réflexion. Car le splendide dessin, au rendu « poilu », restitue l’évidence de la simplicité et crée une poésie au timbre mélancolique. Et confirme qu’un trait, seul, pour peu qu’il soit virtuose, suffit à dire beaucoup.
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