Gus #4
On avait quitté Gus sur trois épisodes enlevés, drôles, le plus souvent jubilatoires — publiés entre 2007 et 2008. Après une incursion dans le théâtre de la politique (Quai d’Orsay), une autre derrière les fourneaux (En cuisine avec Alain Passard) ou encore à moto (La Fille), Christophe Blain revient au western. Et de quelle façon !
Happy Clem débute par une intro presque trompeuse, qui donne le ton — bien plus sombre que par le passé : Gus Flynn, masqué, tente de faire son « come-back », attaque un train, fait une crise d’angoisse, et assassine à tour de bras. Le gangster à long nez, toujours en quête d’amour, effraie désormais plus qu’il n’amuse. Quelques pages plus loin, il laisse la place à Clem, « happy » comme l’indique donc le titre du volume. Marié à une femme intelligente et lettrée, dont il semble toujours amoureux, et père d’une fillette vive, curieuse, et attirée par l’étrangeté. Est-il capable de mener une vie honnête, rangée, de commerçant ? Evidemment non. Son copain Gratt lui propose un braquage, la tentation est trop forte. Revoilà Clem dans la peau d’un voleur, avec un costume de scène classieux — tellement qu’il devient le héros de comics sous le nom de Beau Bandit.
La centaine de pages de ce Gus est dense, haletante, fascinante. Son auteur entremêle les intrigues principales et secondaires (cet ami inquiétant qui surgit, devenant ensuite un ennemi ; le côté glauque de la petite Jamie ; l’angoisse de la page blanche de la femme de Clem ; l’attirance de ce dernier pour une braqueuse…) sans faux pas. La mort rôde, la jouissance aussi. Clem a le goût du déguisement, de l’imprévu, du risque. Avec une indéniable maestria graphique — des scènes d’action fluides, une inventivité constante, des couleurs parfaitement dosées —, Christophe Blain emporte son lecteur dans un Ouest sauvage, retors, somptueux.
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