Habemus bastard #1
Le père Lucien, imposant prêtre en soutane et doudoune orange, débarque à Saint-Claude pour s’occuper de la paroisse. Mais cette calme ville du Jura n’est pas une retraite pour cet homme qui n’est vraiment de foi : c’est une planque pour échapper aux représailles de criminels au moins aussi bien armés que lui ! D’abord parano et sur le qui-vive en permanence, le tueur en cavale va finir par endosser le costume catholique avec son style bien à lui, et faire profiter ses ouailles de sa vision du monde bien spéciale, comme de ses connaissances en matière de business illicite…
Le romancier Jacky Schwartzmann, auteur de polar en pleine ascension mais aussi d’une BD avec Morgan Navarro (Stop Work), s’associe au dessinateur Sylvain Vallée (Il était une fois en France, Katanga, Tananarive) pour proposer un diptyque en forme de comédie polar. Et la formule qu’ont trouvé les deux auteurs fonctionnent parfaitement : le « héros » distille ses états d’âme en voix off, on le voit trouver sa place – parfois avec un certain manque de tact – au sein de la communauté de Saint-Claude, et quelques sauts temporels ou géographiques viennent apporter des infos sur son parcours et les raisons de sa fuite. Le tout avec pas mal d’humour, autour du décalage entre le personnage et sa fonction, et notamment via son langage sacrément fleuri. Le trait réaliste de Sylvain Vallée, chaleureux et léché, convient idéalement à ce récit qui a besoin d’une assise graphique crédible pour qu’on y adhère.
Néanmoins, passé les délicieuses scènes de messe et les bons conseils du père Lucien à un apprenti dealer, l’effet de surprise ne joue plus vraiment et l’on risque bien de se retrouver avec un polar plaisant mais assez standard. Peut-être que si le héros avait été bien plus irrévérencieux et blasphématoire, la comédie aurait pu être plus pimentée ou acide. Là, elle se laisse déguster tranquillement, et c’est un peu frustrant.
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