Harvey Pekar est mort
Le scénariste de bandes dessinées américain Harvey Pekar est mort le 12 juillet, à l’âge de 70 ans. Souffrant d’un cancer de la prostate et d’hypertension, les causes précises de son décès sont encore inconnues à cette heure.
Harvey Pekar, c’est surtout American Splendor. Une somme, l’oeuvre d’une vie, par un type qui se met à écrire sa vie, justement, au milieu des années 70. Râleur, hyponcondriaque et parfois vraiment malade, militant de gauche occasionnel et grand collectionneur de disques de jazz, Harvey Pekar est né en 1939 à Cleveland et s’est employé comme archiviste dans un hôpital pendant des années. C’est son quotidien et ses états d’âme qu’il narre dans American Splendor, bande dessinée autobiographique qu’il démarre en 1976 (en auto-édition). Et qui trouve peu à peu son public, notamment grâce aux dessinateurs de grand talent qui l’ont illustré, comme Robert Crumb, Dean Haspiel, Gary Dumm, Spain Rodriguez ou Joe Sacco.
Dans ses BD, l’auteur s’y dénigre beaucoup, puis clame vertement sa fierté d’être différent, raconte son morne train-train, puis détaille les choses qui lui tiennent à coeur, composant ainsi un autoportrait mosaïque qui évolue au gré des aléas de sa vie (son mariage, son cancer, ses amis, son travail…). Parfois énervantes, souvent touchantes, ses pages sont aussi un témoignage rare d’un travailleur américain moyen, lucide sur les relations sociales difficiles d’un habitant lambda des banlieues d’une grande ville des États-Unis.
En 2003, Robert Pulcini et Shari Springer Berman réalisent une adaptation ciné fort réussie d’American Splendor, avec l’excellent Paul Giamatti dans la peau de Pekar. Ce dernier fait aussi quelques apparitions et commentaires au sein même du film, lui donnant ainsi un aspect mi-fiction, mi-documentaire tout à fait pertinent.
Longtemps réservé aux lecteurs anglophones, American Splendor fait enfin l’objet d’un sérieux travail d’édition en France, grâce d’abord à Çà et Là, qui a sorti l’an dernier le premier volume d’une anthologie (nommé à Angoulême 2010, en sélection Patrmoine). Et qui annonce le tome 2 pour l’automne. Les éditions Cornélius, quant à elles, lui consacreront aussi un volume à la rentrée prochaine, avec un ouvrage consacré à ses collaborations avec Robert Crumb. Bref, de quoi se (re)plonger dans un monument de la bande dessinée alternative américaine.
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American Splendor – anthologie #1 et #2.
Par Harvey Pekar et différents dessinateurs.
Çà et Là: #1 en septembre 2009, 19 €; et #2 en octobre 2010, 20 €.
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Harv’n’Bob.
Par Robert Crumb et Harvey Pekar.
Cornélius, 19 €, le 19 août 2010.
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American Splendor.
Film de Robert Pulcini et Shari Springer Berman.
Avec Paul Giamatti, Hope Davis, Harvey Pekar…
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Images © Pekar – Crumb / Çà et Là et Cornélius
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Je le connais surtout pour son American Splendor, parfois illustré par Crumb, dont j’avais essayé de lire un ou deux numéros i l y a fort longtemps. Voila un auteur méritant qui n’a jamais fait de comics débiles de super-héros costumés et musclés, ni les autres genres en vogue aux States (arts martiaux, humour bebete, policier à la Rip Kirby; SF à la Flash Gordon, junglerie à la Tarzan). Il avait une sensibilité à l’européenne, parfois ennuyeuse, mais subtile et exigeante. Je lui rends hommage, car j’arrive bientôt dans sa tranche d’âge.
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