Hawkeye #1
Si vous avez découvert l’existence d’Hawkeye avec le film Avengers, vous avez dû vous interroger sur la présence d’un archer sans super-pouvoir au sein de la troupe de surhommes réunie par Nick Fury. Cela tombe bien, lui aussi se demande un peu ce qu’il fiche là, nous rassure Matt Fraction, le scénariste en charge des aventures solo du personnage depuis l’an dernier. Chez lui, Hawkeye compte moins que son alter ego à la ville, Clint Barton, qui, comme le veulent les canons de ce héros Marvel créé en 1964, est un mercenaire formé enfant au tir de précision dans un cirque. Même confiant dans sa capacité à mettre dix types par terre à lui tout seul et à décocher des flèches dans le mille dans les positions les plus acrobatiques, Barton a du mal à se voir autrement qu’en éternel remplaçant, regardant évoluer depuis le banc la dream team emmenée par Captain America. Fraction en joue et n’hésite pas à le mettre souvent en fâcheuse posture pour accentuer son côté humain-trop-humain, par exemple en le faisant atterrir pieds nus sur du verre, façon John McClane dans Piège de Cristal. Le clin d’œil est tout sauf fortuit : ce Hawkeye-là est de la trempe des héros popularisés par Bruce Willis dans les années 90. Des cow-boys bougons, amenés un peu malgré eux à jouer les défenseurs de la veuve et de l’orphelin. Après tout, le personnage se prénomme Clint…
Dans sa première aventure de l’ère Fraction, Barton se retrouve à devoir résoudre des problèmes très locaux : ses voisins sont rackettés par des malfrats, et comme il aime bien ses voisins, il prend les choses en main. Une réduction d’échelle et d’enjeux plutôt reposante pour les lecteurs habitués à la surenchère interstellaire des autres titres Marvel et qui permet à l’auteur de déployer un ton et des dialogues assez frais, fantaisistes et parfois même un peu décousus – c’est la touche de l’auteur, aussi connu pour le dadaïste Casanova. Sentiment renforcé par le séduisant style épuré – parfois jusqu’au minimalisme – de l’Espagnol David Aja (remplacé exceptionnellement en fin de volume par Javier Pulido, à la ligne plus ronde). La judicieuse mise en couleurs, sobre et élégante, de Matt Holingsworth achève de donner un ton très adulte et une sacrée personnalité à cet Oeil de Faucon qui en avait bien besoin. Du très beau boulot qui promet une série à part au sein de la Maison des Idées, un espace de respiration et d’expérimentation cool plutôt bienvenu qui, comme on dit chez BoDoï, « change vraiment de la routine super-héroïque ».
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