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14 Comments

Hubert et Marie Caillou face à l’anorexie

15 novembre 2010 |

chair_araignee_introElle pèse le peu qu’elle mange et se flatte d’avoir l’allure d’un petit garçon. Lui n’a jamais faim et lutte contre l’ogre tapi au fond de son corps, qui parfois réclame avec puissance de la nourriture. Ce sont les deux personnages anorexiques de La Chair de l’araignée, un ouvrage à la fois doux et glaçant, attachant et morbide. Une plongée hypocalorique et poétique dans un monde adolescent qui se torture et rêve. Le scénariste Hubert (Miss Pas Touche, Bestioles…) et la dessinatrice Marie Caillou – dont c’est la première bande dessinée – détaillent la création de ce bouleversant one-shot, qui leur a rappelé leur jeunesse.

chair_araignee_vesteComment cet album est-il né?
Hubert : Avec Marie – et d’autres auteurs -, nous partageons le même atelier. La voir dessiner m’a donné envie de faire un album avec elle. J’ai commencé tout seul dans mon coin, sans lui en parler. Je voulais depuis longtemps aborder le thème de l’anorexie mais, jusqu’ici, je n’avais pas trouvé le bon angle. Le trait de Marie m’a aiguillé.
Marie Caillou : Nous avions déjà discuté de ce thème, et réalisé que vous avions un point commun : sans avoir vécu l’anorexie mentale, nous avions tous deux eu des troubles du comportement alimentaire lorsque nous avions une vingtaine d’années.
H. : J’ai donc proposé un premier jet à Marie, qui se concentrait sur le personnage masculin. Nous avons ensuite développé ensemble celui de la jeune femme, en y incorporant des anecdotes qu’elle m’a racontées.
M. C. : Mais ce n’est pas un album autobiographique pour autant! Le récit est un amalgame entre de nombreuses sources.

chair_araignee_carotteL’histoire avance en effet comme une sorte de rêve, et semble parfois détaché de la réalité…
M. C. : C’est cet onirisme, souvent présent dans les livres d’Hubert, qui m’a séduite. Car c’est aussi autour de ce style poétique que j’aime travailler.
H. : Plus que l’anorexie en tant que telle, le thème du livre est: qu’est-ce que ça fait de vivre sans son corps. C’est le côté mental plus que le côté clinique qui m’intéressait. En me rappelant ma façon de penser quand j’avais 20 ans, je me suis replongé dans une vision du monde complètement étrange, qu’il m’est difficile de comprendre aujourd’hui.
M. C. : Car nous nous considérions comme normaux à l’époque! C’était les autres qui étaient bizarres, mais nous, nous vivions notre comportement alimentaire dans la plus grande banalité. Nous ne le percevions même pas comme un problème.
H. : Même s’ils vivent dans un profond mal-être, les deux personnages simplement des jeunes gens un peu seuls, plutôt brillants dans leurs études, qui se cherchent comme tous les autres jeunes gens. J’ai voulu les présenter dans leur subjectivité, placer le lecteur à l’intérieur de leur esprit. Leur rapport au corps n’est qu’un symptôme. Leur vrai problème est ailleurs..

chair_araignee_miroir

Pourtant, on sent une certaine distance dans la mise en scène.
H. : Oui, parce que je ne voulais pas faire dans le didactique. J’ai souhaité tirer l’histoire vers la pure fiction, quitte à ne pas être exhaustif sur certains points, encore une fois pour coller aux personnages et à ce qui leur passe par la tête. Cela rejoint l’état mental des personnes souffrant d’anorexie: le corporel n’a plus d’importance, la réalité se dissout. Les adolescents anorexiques refusent ainsi que leur corps change, car ils ne se reconnaissent plus ou, en tout cas, il ne reconnaissent plus le corps auquel ils s’étaient habitués. Inconsciemment, en adoptant des pratiques extrêmes dans leur alimentation, ils reprennent le contrôle de leur corps.
M. C. : Graphiquement, c’est un peu la même chose. Contrairement à mon histoire de fantômes japonais dans le film Peur[s] du noir, sur laquelle je travaillais avant La Chair de l’araignée, j’ai dû ici dessiner la réalité. Un défi complexe, mais plaisant. D’autant que j’ai pris certaines libertés, et donc installé une distance: je représente souvent mes personnages de manière très frontale, ce qui donne un aspect théâtral aux séquences.
H. : De mon côté, j’ai souvent imaginé que j’écrivais une sorte de sitcom. Je pouvais ainsi pousser les moments drôles,jouer sur le ridicule de certaines situations. Pour éviter toute complaisance et ne pas tomber dans le sordide.

chair_araignee_ogrePourquoi n’abordez-vous pas le thème des images de mode et des mannequins maladivement minces, qui complexent les adolescentes, et dont on a beaucoup parlé récemment?
H. : Justement parce que je pense qu’il s’agit d’un phénomène récent. Cette maigreur extrême de certains top models n’était pas aussi courante quand j’étais plus jeune, période sur laquelle je me suis basé pour écrire. À part quelques références aux publicités pour produits allégés, je n’évoque d’ailleurs pas trop l’importance des déterminismes culturels dans l’anorexie. On pourrait ainsi parler pendant des heures de l’héritage judéo-chrétien en la matière, sa manière de voir le corps comme une chose sale, d’instituer la souffrance de la chair pour élever l’esprit…

Concrètement, comment avez-vous travaillé?
H. : Comme souvent, je procède par écriture automatique. Il reste ensuite pas mal de trous, d’incohérences, de choses bancales. Et, en général, je lisse le tout par la suite. Mais pour cet album, j’ai tenté de conserver cet aspect brut de décoffrage. J’ai fourni un pré-storyboard à Marie, sans dessin, mais avec les dialogues placés dans les cases sur chaque page.
M. C. : Je dois dire que j’ai abordé ce médium, que je ne connaissais pas, avec pas mal de naïveté. Hubert m’a ainsi donné mes premières leçons de bande dessinée! Comme il avait déjà découpé toute l’histoire, j’ai eu moins de difficultés à aborder la mise en scène en BD, qui est bien différente de celle des dessins animés.

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Quelles ont été les plus grandes difficultés de cet apprentissage?
M. C. : J’ai l’habitude de dessiner des visages ronds, mais ça ne collait évidemment pas avec des personnages anorexiques… Je ne me suis pas posé beaucoup de questions, et me suis amusée graphiquement avec les éléments que j’aime. J’apprécie notamment de dessiner des chose très trash dans un style joli et des couleurs douces, afin de créer un contraste violent. Le propos passe souvent mieux ainsi.

Ce projet a-t-il été compliqué à vendre auprès des éditeurs?
H. : Nous avons eu des réactions très différentes. Notamment auprès d’un éditeur avec lequel j’ai l’habitude de travailler, qui a exprimé un rejet massif du projet. Cela m’a surpris et en même temps rassuré, car je craignais d’avoir fait quelque chose de trop mignon. Après, d’autres éditeurs ont été enthousiastes, et nous avons signé avec le plus enthousiaste d’entre eux!

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Hubert, vous êtes membre du syndicat des auteurs. Lors du dernier Festival d’Angoulême, vous avez tiré la sonnette d’alarme concernant les négociations sur la bande dessinée numérique et les rémunérations des auteurs. Ces sujets ont-ils avancé?
H.: Le groupe BD du SNE (Syndicat national de l’édition) nous a reçus longuement en juin dernier. Malheureusement, depuis, il se comporte comme une anguille. La question du droit moral est toujours au point mort, et la clause de rendez-vous (qui prévoit que l’auteur et l’éditeur doivent se rencontrer régulièrement pour discuter de l’exploitation numérique des oeuvres) est insatisfaisante car, si elle fixe une obligation de rencontre, elle n’oblige pas à négocier! Mais le fait que de nombreux auteurs soient mobilisés sur ces questions use les services juridiques des éditeurs, et nous permet de maintenir l’existence d’un grain de sable dans la machine… en espérant que ce grain de sable ne soit pas purement et simplement écrasé. La question globale de la rémunération est toujours en suspens, puisque la pratique du forfait [une somme forfaitaire pour un album, quelle que soit sa longueur] est en train de prendre le pas sur le prix à la planche. Certains éditeurs estiment qu’il y a trop d’auteurs sur le marché aujourd’hui, et vont même jusqu’à insinuer que le syndicat devrait « faire le ménage »! Alors que ce sont eux qui ont professionnalisé tous ces artistes en leur signant des contrats pour des livres! L’obsession de voir grimper le chiffre d’affaires a poussé les maisons d’édition à augmenter le nombre de sorties. Mais dans le même temps, les ventes moyennes ont baissé et les auteurs gagnent moins bien leur vie qu’avant.

Quels sont vos projets?
M. C. : Je vais continuer un peu dans la bande dessinée. Je travaille actuellement sur un album drôle et fantastique pour Dargaud. Et, avec Hubert, nous avons un nouveau projet commun.
H. : De mon côté, je continue Reine Beauté, qui s’appellera en fait Beauté tout court, avec les Kerascoët. Le tome 1 sortira en album au printemps, tandis que le tome 2 sera, comme le premier, prépublié dans Spirou. Pour la collection 1000 Feuilles de Glénat, j’ai deux projets en tant que scénariste avec Benjamin Bachelier et Zanzim. Et, comme coloriste, j’ai travaillé sur L’Île des 100 000 morts, écrit par Fabien Vehlmann et dessiné par Jason, prévu pour janvier.

Propos recueillis par Benjamin Roure

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La Chair de l’araignée.
Par Marie Caillou et Hubert.
Glénat / 1000 Feuilles, 15 €, le 27 octobre 2010.

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Commentaires

  1. Francis Pincemoi

    Texte informatique, couleurs à la photoshop, dessin style blog et sujet déprimant: pas vraiment ma tasse de thé!!

  2. Francis Pincemoi

    Texte informatique, couleurs à la photoshop, dessin style blog et sujet déprimant: pas vraiment ma tasse de thé!!

  3. PYL

    Très bel album, un scénario sensible et elliptique, un dessin magnifique, une vraie réussite!

  4. PYL

    Très bel album, un scénario sensible et elliptique, un dessin magnifique, une vraie réussite!

  5. Phil

    Un dessin magnifique??? Oh zut, Bodoi s’est trompé en mettant les images, elles ne correspondent pas.

  6. Phil

    Un dessin magnifique??? Oh zut, Bodoi s’est trompé en mettant les images, elles ne correspondent pas.

  7. Robby

    C’est vrai que c’est très moche comme dessin, vraiment blog amateur pas doué, et la typo informatique ça aide pas. Bizarre de publier des trucs pareils, il y a quelques années ça n’aurait même pas eu sa place dans un fanzine.

  8. Robby

    C’est vrai que c’est très moche comme dessin, vraiment blog amateur pas doué, et la typo informatique ça aide pas. Bizarre de publier des trucs pareils, il y a quelques années ça n’aurait même pas eu sa place dans un fanzine.

  9. caillou

    Un dessin très moche ? Couleurs à la photoshop ? Ha, je vois qu’il y a parmi vous de sacrés connaisseurs…Ouf, heureusement que vous êtes là pour préserver la qualité et le bon goût.

  10. caillou

    Un dessin très moche ? Couleurs à la photoshop ? Ha, je vois qu’il y a parmi vous de sacrés connaisseurs…Ouf, heureusement que vous êtes là pour préserver la qualité et le bon goût.

  11. Gilles

    Je suis d’accord avec vous Caillou, c’est vraiment nul comme bouquin.

  12. Gilles

    Je suis d’accord avec vous Caillou, c’est vraiment nul comme bouquin.

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