Hugo Pratt et Corto Maltese, à la lumière des rêves
Les éditions Gallimard et Cong (qui gère l’oeuvre d’Hugo Pratt) publient un beau livre à partir de l’oeuvre du créateur de Corto Maltese, autour du thème du rêve. L’occasion de se replonger dans les planches et les aquarelles les plus oniriques de l’auteur.
Sur la quatrième de couverture de Hugo Pratt, les chemins du rêve, une citation de l’artiste suffit à poser le propos : « Contrairement à beaucoup d’autres, qui racontent des mensonges en essayant de les faire passer pour des vérités, je raconte la vérité comme si c’était un mensonge. Mes oeuvres se prêtent donc à une double, à une triple interprétation ; le lecteur découvre que certaines choses que j’ai dites étaient vraies, et il lui vient alors une forte envie de partir à leur recherche. » Ainsi, cet ouvrage de grand format s’attache à montrer ce que Pratt signifiait vraiment par là, et de quelle manière il utilisait les ressorts narratifs très littéraires du rêve, principalement dans les aventures de Corto Maltese.
Ainsi, un long texte érudit de Francesco Boille explore les lieux arpentés par Pratt dans ses bandes dessinées, de Venise au Nicaragua, en passant par la Sibérie, Stonehenge, le Somaliland, les îles du Pacifique ou le Canada. Et étudie en quoi, selon lui, Hugo Pratt était « le Grand maître du reversement (rêvé) », dans ces lieux parfois magiques, parfois historiques, porteurs d’une dimension poétique ou politique forte, à laquelle il ajoutait son patte personnelle, sa vision du monde. « Entre le vrai et le faux, entre l’original et son double, entre des lignes horizontales épaisses et des passages étroits – autant d’oppositions toutes réversibles –, Pratt, qui ne manquait jamais une occasion de revendiquer son appartenance au signe zodiacal des Gémeaux, a fait imprimer pendant des décennies, sur ce support concret et délicat qu’est le papier, la seule vérité possible », conclut-il.
Un grand nombre de planches et d’illustrations, en pleines pages, illustrent cette analyse. Provenant des différentes BD, telles Têtes et champignons, Fables et grands-pères, Mû, Jesuit Joe – l’homme du Grand Nord, Corto Maltese en Sibérie, Tango ou La Maison dorée de Samarkand. Dans ce grand volume souple, un papier épais et très agréable au toucher offre une belle qualité de reproduction, évitant le clinquant d’un papier brillant. Les aquarelles n’en ressortent que plus charnelles et envoûtantes. Et en prime, la jaquette de l’ouvrage se déplie, en un classieux poster de Corto. Un beau cadeau pour les fans, pour les faire patienter jusqu’au nouveau Corto Maltese signé Pellejero et Dias Canales, à paraître en novembre.
À noter qu’une exposition à la Fondation Folon en Belgique est le pendant de cet ouvrage, visible jusqu’au 24 novembre.
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Hugo Pratt, les chemins du rêve.
Sous la direction de Patricia Zanotti, textes de Francesco Boille et Giulio Giorello.
Gallimard/Cong, 120 p., 28 €, septembre 2019.
Images © Cong
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