« La moindre ligne de Panaït Istrati est un portrait de lui, car jamais écrivain ne fût plus présent, corps et âme dans son œuvre. ” En introduction de ce magistral Istrati !, Golo cite le grand Joseph Kessel. Largement méconnu — notamment de l’autrice de ces lignes —, Panaït Istrati est pourtant un personnage de roman. Un Roumain né dans la pauvreté, autodidacte, voyageur, écrivain, communiste, qui dénoncera les dérives staliniennes.

Golo (Mes mille et une nuits au Caire, Chroniques de la nécropole…) s’est lancé dans une foisonnante biographie, en deux volumes. Ce premier album débute par la mort de l’artiste en 1935, qui lance une journaliste sur ses traces. Juliette Pary, traductrice de romans policiers, rencontre un certain Georges Ionesco, qui le connut bien. Ce dernier endosse le rôle du narrateur, contant un parcours fabuleux, entre misère, apprentissage constant et exaltation régulière.

Né en 1884 à Braïla sur le Danube, élevé par une mère blanchisseuse, le jeune Istrati se forge des amitiés marquantes, et romanesques. C’est tout le sujet de ce livre foisonnant : restituer le lien du gamin avec l’ancien forçat Codine – le duo ressemble à « un éléphant flanqué de son poulain » ; son affection par le Capitaine Mavromati, qui lui apprend la langue de son père, le grec ; sa tendresse pour Kir Nicolas, un pâtissier voisin à la belle générosité ; ou encore son attachement profond et durable à Mikhaïl, vagabond ardent dont il partage les poux.

Dans un noir et blanc tantôt léger, tantôt profond, Golo conte les rebondissements amicaux, les aventures internationales, les – nombreux – moments de galère et de désespoir. Son trait riche et habile sait figurer l’outrance, les sentiments vifs, l’emballement. Avec Istrati, on vibre, on tremble. On partage très volontiers un peu de son quotidien débordant, terriblement passionnant.