Jacques Ferrandez referme ses Carnets d’Orient
Il est né à Alger en 1955, et a quitté l’Algérie un an plus tard. Évitant ainsi le grand et traumatisant départ des Français en 1962, après l’Indépendance. En 1987, Jacques Ferrandez a commencé à décrypter l’histoire de son pays natal, avec Carnets d’Orient. D’abord prévue en cinq volumes autour de la période coloniale, cette fresque réaliste aux couleurs lumineuses s’est prolongée, à partir de 2002, d’un second cycle. Cette fois, l’auteur se frotte aux tensions grandissantes entre Pieds-Noirs et Algériens. Dans le dixième et dernier tome de sa saga, Terre fatale, sur laquelle planent les ombres mêlées de Delacroix et Camus, il s’attaque à la guerre. On suit les amours contrariées de Samia, militante du F.L.N. (Front de Libération Nationale) et d’Octave, militaire éclairé, un temps putschiste. Jacques Ferrandez revient sur cette épopée, empreinte d’une histoire toute personnelle.
Ce dixième épisode signe-t-il vraiment la fin de Carnets d’Orient?
Ma réponse était inébranlable au début, lorsqu’on me posait cette question. Maintenant, je fléchis… Aucune suite n’est vraiment prévue, mais tous mes personnages ne sont pas morts. La fin de cet album est ouverte. Pour assurer mes vieux jours peut-être… En tout cas, je ne me vois pas confier cette série à un autre auteur, j’ai l’impression d’être le seul à pouvoir raconter l’histoire de mes héros.
Quand on aborde un sujet aussi sensible que cette guerre, comment trouver le ton juste?
Je ne suis pas sûr de l’avoir trouvé. Heureusement, pour le moment je ne récolte que des réactions positives, ce qui me rassure un peu.
Vous avez choisi de ne prendre parti pour aucun camp…
Je ne juge pas, je me contente de montrer des itinéraires, d’être en empathie avec mes héros. J’aime être à hauteur d’homme. Comme pour mes albums précédents, je me suis mis dans la peau de mes personnages afin de les faire agir de façon naturelle et humaine. Ils sont broyés par une Histoire dont ils ne connaissent pas la fin. Et ils doutent beaucoup. Octave, par exemple, doit se déterminer par rapport au putsch des Généraux [qui, le 23 avril 1961, tentèrent un coup d’État à Alger], tandis qu’il veut retrouver Samia. J’essaie toujours de montrer les raisons qui poussent un protagoniste à aller dans telle ou telle direction.
Comment construisez-vous votre scénario?
Il est totalement évolutif. À la base, je dispose d’un canevas général, avec quelques jalons posés. Ce sont d’ailleurs souvent des événements historiques, des dates précises. Dès qu’une douzaine de pages sont dialoguées, je commence à dessiner. Mais il reste toujours des points brumeux. Par exemple, je ne savais pas si j’allais faire d’Octave un putschiste anti-gaulliste. Mais il est logique qu’il le soit, en tant que Pied-Noir. Je souhaitais montrer au passage que tous les putschistes n’étaient pas des fascistes. Pour créer le personnage d’Octave, je me suis inspiré du parcours d’Hélie Denoix de Saint-Marc, un putschiste qui fut aussi un jeune résistant, déporté à Buchenwald. J’aime montrer la complexité des gens et du monde. Et puis je me demande toujours ce que j’aurais fait dans la position de mon héros, si j’étais né quinze ans plus tôt…
Comment vous êtes-vous documenté sur cette période précise (1960-1962), très dense et trouble?
J’ai tout découvert au fur et à mesure que j’avançais dans la préparation de l’album. J’ai attaqué mon histoire chronologiquement. J’avais avant une vision assez floue des dates! J’ai creusé certains détails qui pourraient donner matière à plusieurs épisodes, comme l’attaque riche en rebondissements par l’O.A.S. [Organisation de l’Armée Secrète] d’une résidence de barbouzes gaullistes.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées sur ce dixième tome?
Je me suis posé beaucoup de questions. Comment faire qu’une histoire pareille soit lisible, intelligible pour un lecteur qui ne maîtrise pas le sujet? J’ai tenté d’injecter un maximum de simplicité et de clarté. J’ai utilisé mon «capital personnages»: certains ont pris la place de personnes réelles, comme Jacob, le parrain de Marianne, qui représente dans mon récit les Pieds-Noirs modérés. Il connaît une fin tragique après une interview télévisée, inspirée par ce qui est arrivé à un jeune avocat à la tête d’un mouvement libéral à Alger.
Quelle part votre famille a-t-elle eu dans votre décision d’amorcer une saga historique algérienne?
De bons souvenirs d’Algérie circulent dans ma famille. Mes parents l’ayant quittée de leur propre chef en 1956, sentant que la situation se gâtait, leur douleur a été moins importante que celle des Pieds-Noirs contraints à partir en 1962. J’ai beaucoup entendu parler de ce pays grâce à mon grand-père maternel. Je me suis installé à Paris en 1984, alors qu’il y résidait aussi, et j’ai alors énormément discuté avec lui, un petit enregistreur sous la main. Deux ans plus tard paraissaient les premières planches de Carnets d’Orient dans le magazine Corto Maltese…
Quels sont vos projets aujourd’hui?
Après un sujet aussi lourd, violent, quasi obsédant, j’ai envie de faire autre chose. J’envisage une transition en douceur, autour de deux-trois livres. J’illustre Nos ancêtres les Pygmées, un texte de Didier Daeninckx sur la décolonisation pour les éditions Rue du monde, ainsi que le livre tiré du prochain spectacle de l’humoriste Fellag. Cela se passe dans la Casbah d’Alger, dans les années 1930. Mes dessins accompagneront aussi les textes d’un guide de voyage sur Marrakech, coédité par Lonely Planet et Casterman. Et puis je travaille sur un one-shot en bandes dessinées, mais le contrat n’est pas encore signé. Je peux juste dire que ce ne sera pas chez Casterman, et que cela ne m’éloignera ni historiquement, ni géographiquement de Terre fatale…
Propos recueillis par Laurence Le Saux
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Carnets d’Orient #10
Par Jacques Ferrandez.
Casterman, 15 €, le 22 avril 2009.
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la BD de Ferrandez est d’une malhonneteté historique dont il n’a même pas une claire conscience. Impartial….? oui mais toujours du coté du manche, et il sait fort bien que dire la vérité lui fermerait les portes de l’édition: téméraire, oui mais….. carriériste d’abord.
Son affirmation suivant laquelle il n’a reçu que des commentaires élogieux est un mensonge flagrant. Outre qu’il est méprisé cordialement par tous ses compatriotes pieds noirs, j’ai pu pu lui faire parvenir un document prouvant son mensonge et sa mauvaise foi dans une affaire que j’ai fort bien connue et qu’il détourne de la façon la plus méprisable qui soit.
Et pourtant je suis prêt à tenir compte du fait qu’il n’a absolument rien connu des évènements dont il parle. Heureusement, il reste encore quelques centaines de milliers de témoins agés mais vivants , qui savent de quoi on parleJe suis prêt à produire et publier à nouveau cet argumentaire.
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la BD de Ferrandez est d’une malhonneteté historique dont il n’a même pas une claire conscience. Impartial….? oui mais toujours du coté du manche, et il sait fort bien que dire la vérité lui fermerait les portes de l’édition: téméraire, oui mais….. carriériste d’abord.
Son affirmation suivant laquelle il n’a reçu que des commentaires élogieux est un mensonge flagrant. Outre qu’il est méprisé cordialement par tous ses compatriotes pieds noirs, j’ai pu pu lui faire parvenir un document prouvant son mensonge et sa mauvaise foi dans une affaire que j’ai fort bien connue et qu’il détourne de la façon la plus méprisable qui soit.
Et pourtant je suis prêt à tenir compte du fait qu’il n’a absolument rien connu des évènements dont il parle. Heureusement, il reste encore quelques centaines de milliers de témoins agés mais vivants , qui savent de quoi on parleJe suis prêt à produire et publier à nouveau cet argumentaire.
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On parle bien d’anciens departements francais…
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On parle bien d’anciens departements francais…
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Avant 1962,on ne parlait pas d’Algeriens…
Les Francais ne comprendront jamais la complexité du problème.
Algeriens de terre et Francais de nationalité.Le drapeau,avant la terre,c’est là ou on s’est fait rouler dans la farine… -
Avant 1962,on ne parlait pas d’Algeriens…
Les Francais ne comprendront jamais la complexité du problème.
Algeriens de terre et Francais de nationalité.Le drapeau,avant la terre,c’est là ou on s’est fait rouler dans la farine… -
MC SJuan le 13 août 09
De quel droit un commentateur ose-t-il parler, au sujet de Jacques Ferrandez, du mépris supposé que ressentiraient « tous ses compatriotes pieds-noirs »? De quel droit parler en notre nom? Les Pieds-Noirs sont très divers, tant idéologiquement que dans leur rapport avec leur histoire et leur regard sur l’Algérie actuelle. Beaucoup lisent les BD de cet auteur, et beaucoup auront apprécié aussi, comme moi, la magnifique préface de Maïssa Bey. Cet ouvrage, « Terre fatale », est un livre humaniste, une oeuvre nécessaire. Bien sûr, certains, qui crient plus fort que les autres, voudraient faire croire que tous pensent comme eux (et ils donnent de nous une image déplorable, qui ne correspond en rien à la réalité). Non, la grande masse des gens est très loin des franges politiques auxquelles on voudrait les assimiler. Mais il y a des esprits… extrêmes, qui veulent nous prendre en otage, dans les filets de leurs obsessions haineuses. (Et, bien sûr, il y a, autres bords, autres franges, d’autres idéologies, autrement haineuses, autrement extrêmes, qui sont ravies de trouver matière à amalgames, pour condamner « LES » Pieds-Noirs. Or écrire « tous » ou « les », ce sont des fautes de grammaire et de sens… -
MC SJuan le 13 août 09
De quel droit un commentateur ose-t-il parler, au sujet de Jacques Ferrandez, du mépris supposé que ressentiraient « tous ses compatriotes pieds-noirs »? De quel droit parler en notre nom? Les Pieds-Noirs sont très divers, tant idéologiquement que dans leur rapport avec leur histoire et leur regard sur l’Algérie actuelle. Beaucoup lisent les BD de cet auteur, et beaucoup auront apprécié aussi, comme moi, la magnifique préface de Maïssa Bey. Cet ouvrage, « Terre fatale », est un livre humaniste, une oeuvre nécessaire. Bien sûr, certains, qui crient plus fort que les autres, voudraient faire croire que tous pensent comme eux (et ils donnent de nous une image déplorable, qui ne correspond en rien à la réalité). Non, la grande masse des gens est très loin des franges politiques auxquelles on voudrait les assimiler. Mais il y a des esprits… extrêmes, qui veulent nous prendre en otage, dans les filets de leurs obsessions haineuses. (Et, bien sûr, il y a, autres bords, autres franges, d’autres idéologies, autrement haineuses, autrement extrêmes, qui sont ravies de trouver matière à amalgames, pour condamner « LES » Pieds-Noirs. Or écrire « tous » ou « les », ce sont des fautes de grammaire et de sens…
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