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Joker – Killer Smile

8 décembre 2020 |
SERIE
Joker – Killer Smile
DESSINATEUR(S)
SCENARISTE(S)
EDITEUR(S)
COLLECTION
PRIX
15.50 €
DATE DE SORTIE
18/09/2020
EAN
B088B7NNNQ
Achat :

Marre du Joker, vache à lait de DC revisitée à toutes les sauces tous les deux mois ? Le stade de l’overdose est clairement franchi. Et pourtant, forcé de reconnaître face au one-shot Killer Smile que le souriant vilain reste, entre les bonnes mains, une arme de destruction massive apte à faire voler en éclats toute réticence. Omniprésent dans cette histoire, ses cheveux verts, son maquillage et, bien sûr, son sinistre rictus hantant chaque planche, le Joker ne tient pourtant pas le premier rôle. Celui-ci est dévolu à un inconnu, le Dr Ben Arnell, psy affecté au plus célèbre des pensionnaires de l’asile d’Arkham. Tous les jours, ce thérapeute se confronte au Joker, avec l’espoir fou de le guérir. Ah ah, ça va pas la tête ?

joker-killer-smile_image1 Car bien sûr, à fréquenter le Joker de trop près, Arnell va le laisser involontairement pénétrer son esprit. L’épaisse paroi de plexiglas entre eux aurait découragé Hannibal Lecter. Face au Joker, c’est un peu léger. Ses certitudes et son équilibre mental ébranlés, le médecin finira aux confins de la démence. Cela, on le devine dès le départ. Mais pour mettre en scène cette descente aux enfers sans sombrer dans les clichés, il fallait le talent d’une équipe créative aguerrie. Le duo Jeff Lemire-Andrea Sorrentino a de la bouteille et se connaît parfaitement. Les deux hommes ont œuvré de concert sur Green Arrow. Ils ont aussi signé ensemble Gideon’s Fall dans lequel déjà ils bousculaient les codes du thriller, pour retranscrire en mode expérimental la folie de leurs personnages et des situations.

Killer Smile est une réussite de même ampleur. Fusion parfaite de l’écriture et du dessin, ce récit d’horreur psychologique est une formidable proposition de mise en scène qui a l’élégance de ne jamais virer à la démonstration. Virtuoses dans leur découpage, variant les compositions, les cadres, les styles, les tons (brillants interludes façon illustré pour enfants totalement tordu), Sorrentino et Lemire n’en font jamais trop. Ils le savent, le seul et unique chef d’orchestre de leur histoire, celui qui mène la danse ici, c’est le Joker.

Comme dans les plus grands récits dédiés au personnage (le Killing Joke d’Alan Moore et Brian Bolland et le Joker de Brian Azzarello et Lee Bermejo), les deux auteurs ont parfaitement saisi l’essence du personnage, puissante métaphore du chaos. Le Joker est un dingo, mais sa folie est un virus qui n’a pas forcément besoin d’être répandu sous forme de gaz pour se faire un chemin dans les consciences. Surprenant, brutal, dérangeant parfois, graphiquement ultra-percutant dans ce très beau format large proposé par Urban, Killer Joke ressemble à une de ces boîtes mystères qu’affectionne tant le Joker : attention au diable sur ressort qui s’y loge, prêt à vous jaillir au visage.

joker-killer-smile_image2

Commentaires

  1. Abel.Gance

    Excellente critique de Mr G. Regourd!! Ca fait quelque temps que les meilleures critiques que je pouvais lire émanaient plutôt des utilisateurs du site (surtout sur Bd Gest) que des contributeurs. Et là, Mr Regourd merci!
    Merci de nous épargner les sempiternelles et inaugurales trois lignes de résumé et nous faire lire une critique à la hauteur de ce très beau Killer Smile: classe, percutante et argumentée.
    Le seul petit bémol que j’apporterais est l’inadéquation entre le dithyrambe mérité et la non accession à la note maximale de 5 étoiles (pourquoi d’ailleurs?)
    J’en profite pour étendre mon éloge à tous les contributeurs et vous féliciter pour votre site dont j’apprécie fortement le pas de coté et le regard éclairé sans être snob. J’attends avec impatience vos sélections de fin d’année et me retrouve éminemment dans vos choix. Bravo à vous, continuez s’il vous plaît.

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