Jolly Jumper ne répond plus
Alors qu’il débarque dans le patelin de Séville Gulch, Lucky Luke s’interroge sur l’étrange comportement de sa monture, Jolly Jumper : grincheux et taiseux, son cheval lui fait la tête, sans raison apparente… Le désamour s’installe entre les deux compères. Jack Dalton, en prison, a entamé lui une grève de la faim. Pourquoi ? On ne sait pas, mais le procureur de la ville a confié l’affaire à Lucky Luke. Car Jack ne veut parler qu’au cow-boy solitaire, « l’homme qui a eu l’idée de tirer sur son ombre »…
Se frotter à une légende de la BD est toujours risqué. Mais l’excellent Guillaume Bouzard (Plageman, The autobiographie of me too free, Moi, BD, Mégabras, Football, Football...) connaît ses classiques et les a parfaitement digérés. La très bonne couverture donne ainsi le ton de l’album : en décalage, le vieux couple formé par Lucky Luke et Jolly Jumper connaît un sérieux coup de blues. De qui Jolly Jumper est-il le « canasson » ? Bouzard interroge l’identité de son aventurier, autocentré, pas très lucide et encore moins à l’écoute de son fidèle compagnon malgré ses efforts vestimentaires (chemise rouge propre et foulard jaune). Quand la routine s’installe, reste le voyage. C’est Jack Dalton qui va alléger le vague à l’âme du cow-boy en lui confiant une mission de la plus haute importance, puisqu’elle concerne Ma. Oui, oui, Ma, la mère des Dalton !
Deux bons angles narratifs qui rythment une aventure à l’humour bien senti. Les gags s’enchaînent sans lourdeur, l’auteur montrant un art de la réplique (tordante !) et du comique de répétition sans pareil. Bouzard s’approprie le personnage avec juste ce qu’il faut d’impertinence roublarde et pond une histoire référencée, plaisante de bout en bout. Le style graphique jeté, parfait pour peindre des trognes expressives, est lui mis en valeur par les aplats de couleurs vives.
Décidément, lonesome cow-boy inspire les (bons) auteurs. Après le crépusculaire L’Homme qui tua Lucky Luke signé Matthieu Bonhomme, Bouzard réussit un autre joli coup avec cette variation humoristique pleine de malice. De quoi vous faire aimer encore un peu plus le mythe.
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