Keko le magicien ****
Par Carlos Nine. Rackham, 23 €, le 25 octobre 2009.
L’univers de Carlos Nine est unique. D’album en album, même si les histoires et les personnages sont différents, on se retrouve à chaque fois plongé dans un monde élastique, irrévérencieux et magique. Comme si Topor dessinait pour Disney ou si les surréalistes s’étaient mis à la BD. Découvrez donc Keko, illusionniste raté, entouré d’une ribambelle de femmes en manque d’amour, d’une mère possessive et de rivaux sexuels sacrément coriaces.
Comme dans le génial Saubón, le petit canard, paru cette année chez Les Rêveurs, il est ici beaucoup question de désir. Mais Keko, à l’inverse du palmipède en pleine détresse sexuelle, est un tombeur, qui a du mal à repousser les avances des créatures qui s’agitent autour de lui. Cependant, à force de faire la fine bouche, il finit par se faire souffler les demoiselles sous son nez, par plus petit ou plus moche que lui. Car rien n’est logique dans les histoires courtes rassemblées dans ce beau volume au papier luxueux, chaque page est une surprise, un nouveau délire visuel et narratif. Les idées saugrenues s’enchaînent, dans un registre volontiers potache et scabreux (la mère nourricière en forme de sein géant, le caca-tapioca, le poulpe lubrique…), mais véritablement jouissif.
Totalement libéré des contraintes formelles, l’auteur argentin laisse aller sa plume au gré de l’inspiration, pour créer des volutes et des lignes aériennes, agrémentées de couleurs faussement passées. Il dessine comme s’il donnait un spectacle de tango, tout en puissance, rythme et sensualité. Sous son trait, tout prend vie, maisons, légumes ou idéaux. Le magicien, ce n’est pas Keko, c’est Carlos Nine.
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