Kinderland
À quelques semaines de voir le Mur de Berlin s’ouvrir, Mirco, un collégien plus trouillard et plus petit que ses camarades vit une enfance des plus classiques, pour son époque, en RDA. Un matin, il fait la connaissance de Torsten – son antithèse –, plus grand et rebelle, avec qui il va se lier d’amitié par le biais du sport commun à tous ces pré-adolescents : le ping-pong.
Plutôt qu’une approche directe, factuelle, voire sombre de la vie derrière le Rideau de fer, l’Allemand Mawil fait le choix d’une narration à hauteur d’enfant. Car quoi de plus universel que la cour de récréation, le copain ou la copine qui nous plaît ou encore la brute de la classe ? L’auteur s’appuie ainsi sur ce quotidien traversé par chacun d’entre nous pour dévoiler, en second plan, la vie à Berlin-Est en 1989. Le troc pour obtenir la dernière cassette de Depeche Mode ou une raquette de ping-pong, les interrogations sur les voisins qui ont disparu, enlevés par la Stasi ou passés de l’autre côté du Mur… Sans compter les petits détails folkloriques et inévitablement risibles, tels que les looks de l’époque (ah, le mulet, les grosses moustaches !)
Mawil, qui a lui-même vécu en ex-RDA, signe un album dynamique, long de 300 pages et bourré d’anecdotes à valeur de témoignage. Les personnages, du premier aux seconds rôles, sont d’une justesse rare et d’un réalisme sans faute. Porté par un trait vivant, appuyant l’approche « jeune » du récit, Kinderland peut-être rangé entre deux livres d’auteurs tels que Fred Neidhardt ou Guy Delisle, qui, par le biais de morceaux insignifiants du quotidien, réussissent à décrire, une époque, un lieu, une génération. Un roman graphique et historique incontournable alors que les 25 ans de la chute du Mur de Berlin seront célébrés cette année.
À noter que Kinderland a reçu le prix de la meilleure bande dessinée au Festival d’Erlangen, en Allemagne, en juin 2014.
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