La Chenille ***
Par Suehiro Maruo, d’après Edogawa Ranpo. Le Lézard noir, 16 €, octobre 2010.
Quand un soldat rentre de la guerre, on a le droit de crier au miracle et de louer ses dieux. Mais quand il revient atrocement mutilé, n’étant plus que plaies et douleurs, doit-on vraiment se réjouir ? C’est ce qui arrive ici à Tokiko, qui récupère son militaire de mari à l’état de tronc : sans bras ni jambes, sourd et muet, l’homme continue pourtant de vivre. Et c’est par le sexe que les deux époux réapprennent à communiquer…
Entre Johnny s’en va-t-en guerre et L’Empire des sens, le one-shot de Suehiro Maruo (L’Île Panorama) creuse le sillon du genre eroguro (érotico-grotesque) initié par le romancier Ranpo dans le texte d’origine. Il y est question du corps, de son importance sociale et politique, et de la façon de l’utiliser au-delà de ce qu’il est communément admis. Ainsi, les deux époux sont-ils pris d’accès de frénésie sexuelle, souvent brutaux, dans une relation de domination par la femme, inhérente à la condition du mari. Une relation virant volontiers au sado-masochisme, Tokiko finissant même par crever les yeux de cet homme repoussant, mais qu’elle aime… Par son trait fin et prompt aux détails suintants, Suehiro Maruo compose un quasi huis-clos audacieux et dérangeant, qui s’achève dans un élan poétique typiquement japonais. À découvrir, mais à ne pas mettre entre toutes les mains non plus.
Achetez La Chenille sur Fnac.com
Achetez La Chenille sur Amazon.fr
Commentaires