La Chute vers le haut
En 1987 Jean-Marc Thévenet, directeur de la fameuse collection X de Futuropolis, a un coup de cœur. Il téléphone à Étienne Robial, éditeur et maquettiste, pour le voir d’urgence : il a la certitude d’avoir un grand auteur entre les mains. Et pour cause ! Mokeït, jeune auteur de bande dessinée, n’a encore participé qu’à quelques fanzines (mais quels fanzines ! Le Lynx et Réciproquement) et prépare un « Patte de mouche » à L’Association. Co-fondateur de cette structure, il en démissionne quasi-aussitôt et disparaît brusquement du paysage de la BD au début des années 1990 devenant une sorte de légende mystérieuse.
En réalité, Mokeït ne cesse pas de dessiner. On retrouve son fascinant trait anguleux et l’étonnante matière de ses gris dans la presse (Libé, Le Nouvel Observateur, Les Inrockuptibles, Télérama, Le Monde, etc.), sur des affiches et pochettes de jazz ou en illustration de nombreux livres.
De sa carrière dans la BD ne reste donc qu’un modeste livre, modeste mais déjà très riche. En 20 pages subtiles, il décrit le terrible destin d’un homme sur qui l’attraction terrestre n’a soudain plus d’effet. Luttant par tous les moyens pour retourner au sol, il lutte pour tenter d’interrompre son inexorable chute vers le haut… et son saut dans la folie. Épuisé depuis longtemps, ce petit livre est réédité alors que son auteur est revenu à la BD sporadiquement (dans les collectifs XX MMX et Quoi !) ces dernières années. Dans une jolie édition brochée, augmentée d’une nouvelle couverture et d’une préface d’Étienne Robial, La Chute vers le haut n’a rien perdu de sa force près de trente ans après sa première publication.
On saluera encore le travail de The Hoochie Coochie, qui se penche avec courage vers le patrimoine contemporain de la BD alternative, un enjeu essentiel pour la mémoire d’un art encore trop marqué par l’oubli. Une exploration qui a débuté l’an dernier avec la publication de l’OVNI Séquences, de Robert Varlez, et qu’il faut encourager largement : il y a encore tant de perles à découvrir !
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Monsieur Mokeït dessine plutôt bien,mais il semble avoir abandonné la BD pour le domaine plus rentable de l’illustration. C’est tout à fait adroit, et c’est son droit, arf arf arf!°). Maintenant, quelqu’un sait il s’il s’agit de son vrai nom ou d’un pseudonyme ?
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Merci Monsieur Rannou pour cette info. Pour l’anecdote moquettée, je m’en doutais un peu.
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