La Demeure de la chair
Adeptes du genre ero-guro, les temps vous gâtent. Entre deux Suehiro Maruo, Le Lézard noir s’attaque aux années sulfureuses de Kazuichi Hanawa, dont nous connaissions jusque-là certaines œuvres plus tardives (Dans la prison, Contes du Japon d’autrefois,…).
Dans cette production du début des années 1970, se trouvent principalement les récits de femmes soit malveillantes, soit malmenées… ou les deux en même temps, sur fond de Japon d’antan – la fin du volume s’orientant plutôt, elle, vers le folklore fantastique. On y rencontre nombre d’histoires particulièrement ignobles, immorales et souvent vides d’espoir, où se mêlent sado-masochisme, scatologie et autres bains d’hémoglobine. Le tout porté par un vocabulaire graphique très théâtral, à base de compositions décoratives où de petites pastilles légendent l’action, où les plus belles cases sont cerclées d’ornements nippons et où les personnages, très statiques et presque mono-expressifs, semblent emprisonnés dans de cruelles peintures.
Comme le dit l’auteur dans sa préface: “Je n’ai pas beaucoup d’exigence quant aux histoires. L’envie de dessiner est plus forte que tout.” Là se situe le problème. On sent qu’Hanawa est poussé par l’envie de créer des images, sans doute et avant tout pour lui, mais qu’il n’est pas à l’aise avec la narration séquentielle. Certaines nouvelles s’arrêtent abruptement, comme si l’auteur les jetait après s’en être lassé ; d’autres manquent de rythme, ou de liant. Même graphiquement, le niveau varie beaucoup. Inégal et un peu pénible… sans compter que les sujets finissent par se répéter, en plus d’avoir été rafraîchis par d’autres artistes entre-temps. Malgré un charme indéniable on réservera donc, en priorité, ce recueil patrimonial aux historiens du manga et aux forcenés de l’érotique-grotesque.
HANAWA KAZUICHI SHOKI SAKUHINSHU © Kazuichi Hanawa / Seirinkogeisha
-
Tout cela est plutôt bien dessiné pour du manga, mais pourquoi y a t’il tant de violence et de sang? Si j’ai bien compris la grande case qui illustre votre article représente une tentative d’hara-kiri maladroite, puisque le personnage dit ne pas pouvoir mourir. et vous reconnaissez vous-mêmes que ce livre présente des récits de femmes soit malveillantes, soit malmenées… ou les deux en même temps, sur fond de Japon d’antan… donc soit les femmes sont mauvaises et on est misogynes, soit on les maltraite car on est sadique et on aime regarder. Je trouve bien triste qu’un éditeur français publie ce type de livres, alors que le dernier FIBD a été marqué par une exposition remarquée sur les femmes de réconfort coréennes (en fait mises en esclavage par l’armée impériale, pour assouvir les besoins sexuels de sa soldatesque, qui avait moins de permissions que les Soldaten de la Wehrmacht.). Et par la brêve présence d’un éditeur japonais violent et agité, éjecté peu aprés l’ouverture.
Commentaires