La Louve boréale
Joana veut retourner chez elle, pour se reconstruire un avenir. Tala veut démontrer aux hommes qu’elle est leur égale. Opa, elle, croit en la force de la nature, qui équilibrera tout. Toutes les trois vont se croiser, se suivre, se soutenir, essayer de se sauver, au cours d’une longue marche en forêt, à la recherche de pépites d’or. Mais entre la cruauté des hommes et la louve géante qui rôde, ces trois femmes vont frôler plus d’une fois la mort.
Après Géante et Toubab, Nuria Tamarit se lance dans un nouveau one-shot en solo, un imposant conte naturaliste et féministe, véritable hymne au respect de la faune et de flore, à la frugalité, et aussi une dénonciation des violences faites aux femmes. Elle inclut ces thèmes forts et dans l’air du temps dans un décor proche du Grand Nord américain, mais sans avoir jamais besoin de dater ni de situer son histoire. Là n’est pas la question. Ce qui compte ici est de camper trois femmes puissantes, trois facettes d’un archétype capable de s’élever contre le patriarcat et l’esclavage des filles – la forte, la débrouillarde, la sage. Un choix intéressant et engagé mais qui trouve tout de même rapidement ses limites dans une trame scénaristique assez linéaire, dont les quelques flashbacks éclairant sur l’itinéraire et les motivations des héroïnes finissent par être poussifs. Ils ralentissent une intrigue déjà plus contemplative que trépidante, et n’offrent guère de surprises. Au-delà de rebondissements plutôt attendus, ce sont les dialogues qui se révèlent être la principale déception de l’album, trop plats et faibles pour construire des personnages solides et nuancer le manichéisme à la base du scénario (tous les hommes sont le Mal et ne visent qu’à asservir les femmes).
Dommage, car graphiquement, l’autrice propose des planches d’une singulière beauté. Nuria Tamarit a ainsi réussi à, – et c’est suffisamment rare pour le souligner – insuffler une vraie modernité dans la ligne claire, à grands renforts de jeux de textures, de transparences, de contrastes et de dégradés de couleurs. Ses personnages aux lignes arrondies mais à la silhouette raide, ses cadrages proches de l’illustration, ses pleines pages chatoyantes, sa simplicité dans la transmission des émotions, tous ces éléments forgent un style orignal et reconnaissable au premier coup d’oeil, ce qui est bien la marque d’une autrice qui compte. À suivre, on l’espère, avec un scénario un brin plus subtil.
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